"Après un voyage que j'avais organisé à Auschwitz avec les lycéens de Colbert, certains participants se sont étonnés au retour des vacances de Pâques de l'absence depuis plusieurs semaines de Fatoumata Konta. Une pétition des lycéens et enseignants a alors été lancé qui a reçu mon soutien, celui de la proviseur et des médias.

J'avais indiqué aux médias dés avril 2000 que 'Fatoumata est une enfant de la République elle doit revenir en France".

FATOUMATA KONTA, la lycéenne sénégalaise pour qui toutes ses copines s'étaient mobilisées pendant trois mois, aura droit à la séance de rattrapage de septembre pour passer son bac. Retenue par ses parents dans un village de Casamance (Sénégal) depuis les vacances de Pâques, la jeune fille, âgée de 20 ans, élève en terminale scientifique au lycée Colbert à Paris, a atterri hier à 6 heures du matin à l'aéroport de Roissy.

Un retour organisé en moins de 24 heures par les gouvernements français, sénégalais... et par l'ami de Fatoumata. Dimanche dernier, la brillante élève parisienne est convoquée à Dakar par Abdoulaye Wade, président du Sénégal, qui a annoncé qu'il traiterait « personnellement cette affaire » (voir notre édition du 10 juillet). Fatoumata vient de quitter Maradan, son village natal de Haute-Casamance où ses parents d'origine musulmane l'ont ramenée de force. Ceux-ci lui reprochent de s'être liée avec un Français de dix ans son aîné qui n'est ni de son ethnie ni de sa religion.

Désireuse de poursuivre des études d'hypokhâgne

Dans son bureau présidentiel, Abdoulaye Wade écoute d'une oreille attentive le plaidoyer de la lycéenne, désireuse de poursuivre des études d'hypokhâgne au lycée Lamartine à Paris. L'établissement lui a gardé sa place en classe préparatoire si toutefois « l'exilée » obtient son bac en septembre. Le ministère français de l'Education nationale a donné son aval. Fatoumata, dont on ne sait pour l'instant si elle était accompagnée par son père, fait savoir au plus haut dignitaire du Sénégal qu'elle peut prendre le premier avion pour Paris. Son ami, le coeur brisé, lui a fait parvenir un billet d'avion pour la France. Peu de temps après cette conversation, le président du Sénégal reçoit un coup de téléphone de la rue de Grenelle. Jack Lang, ministre de l'Education nationale, sollicité par les professeurs et les élèves du lycée Colbert, s'est rangé parmi les partisans de Fatoumata. Il s'en explique à son interlocuteur déjà convaincu depuis plusieurs semaines.

Abdoulaye Wade, élu en mars dernier, dont l'épouse est d'origine française, a été sensibilisé par le sort de Fatoumata Konta, lors de son premier voyage officiel en France. La décision est rapidement prise. Le président renvoie la lycéenne à ses amours et à ses études. La jeune Sénégalaise sera reçue ce matin sous les ors de la République au ministère de l'Education nationale par Jack Lang. Un court répit avant un mois d'août consacré au bachotage. En quelques semaines, Fatou est devenue la plus célèbre bachelière de France sans même avoir passé son bac.

Le Parisien, François Vignolle, 18 juillet 2000