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mahor chiche - Page 7

  • Comment se payer les services d’une (ex) top model a prix reduit

    Une boutique de mode lance un shopping bag avec l’effigie de Carla Bruni, sans l’autorisation de la première dame. Gros buzz. StreetReporters a sorti sa calculette et vous montre qu’il est plus rentable de taper l’image de l’ex-mannequin que de signer un contrat de marque en bonne et due forme avec une star.

    On se souvient du bon coup de Lancia (avec un contrat officiel avec Carla) et du buzz de la compagnie RyanAir (de manière officieuse cette fois, procès à la clé). Au tour de la boutique de mode Réunionnaise Pardon! d'exploiter le filon, avec un shopping bag à l'effigie de Bruni agrémenté du slogan « Mon mec aurait dû m'acheter du Pardon ».

    En général, les marques s’associent à des stars pour vendre des montres (Cindy Crawford chez Omega), des lunettes (Johny) ou des compotes (Guy Roux chez ED). Ca coûte cher et ça ne fait pas scandale. Côté RyanAir ou Pardon!,  le plan de communication est quasi gratuit : Pas d’achat de spots télé ou de panneaux d’affichage. Juste une attachée de presse, et encore (jointe par StreetReporters, la société Pardon! n'a pas souhaité faire de déclaration). Certes, Carla risque de vous faire un procès, qui va vous coûter un peu d’argent. Mais le calcul est vite fait. Démonstration.

    1. L’Economie du cachet de la star

    Combien coûte un contrat pour associer une marque à un people ? Comptez 10 millions de dollars pour Madonna (chez Louis Vuitton), 5 millions d’euros pour Johnny Halliday (Optic 2000). Carla Bruni, pour Lancia, a touché 2 millions d'euros.
    > Economie faite par Pardon! : 2.000.000€, au minimum

    2. L’Economie de l’achat des espaces pubs et des spots

    Qui ne troquerait pas l'achat d'un espace publicitaire de 30 secondes de 30.000 euros sur TF1 contre un passage quelques minutes plus tard dans le journal du 20 heures de la même chaîne?
    Le buzz Ryanair / Carla Bruni a donné lieu à 171 articles dans les quotidiens et la presse magazine française. Le quart de page en noir et blanc dans la rubrique culture du journal Le Monde est annoncé à 20.000 euros. Evaluons l’article à un prix moyen de 5.000 euros et mettons aussi dans le panier l’équivalent de 10 spots TV :
    > Economie faite par Pardon! : 171 x 5.000 + 10 x 30.000 = 1.155.000€

    3. Le coût du procès
     
    D’évidence, Pardon! devra recourir aux services d’un avocat. Comptez 10.000€ de frais d’avocats, voire 20.000€ si l’une des parties décide de faire appel. Ensuite, il y a l’amende. « Le tribunal devra prendre en compte 3 critères », explique à StreetReporters Me Mahor Chiche, spécialisé en droit de la presse :
    1. Si la marque a obtenu ou pas le droit d’utiliser l’image de Carla Bruni.
    2. Le préjudice causé : En tant qu’ex-mannequin et donc professionnelle qui vend son image, elle dispose d’arguments à plaider devant le juge.
    3. Le fait qu’elle apparaisse nue, alors qu’elle a décidé de ne plus poser dévêtue risque aussi d’alourdir l’amende que devra verser Pardon!.
    Reste que RyanAir avait été condamnée à payer 60.000€ de dommages à la première dame. « En France, on est vraiment en-deçà des niveaux de condamnation que l’on peut constater aux Etats-Unis», analyse Me Chiche.
    > Coût du procès pour Pardon!: 20.000€ de frais d’avocat+ comptons 100.000€ de condamnations = 120.000€
     
    4. Conclusion

    2.000.000€ + 1.155.000€ - 120.000€ = 3.035.000€ d'économies
    Prendre Carla Bruni
    comme support publicitaire coûte moins cher en violant son droit à l'image plutôt qu'en l'employant. Certes, les dirigeants de Pardon! font subir quelques entorses au droit, mais ils sont surtout très doués en maths.

    Matthieu Barbarin, Johan Weisz

  • Après l'agression à Paris 19e

    Après l'agression à Paris 19e
    Les bandes à part de la rue Petit
    Tous les samedis après-midi, autour des Buttes-Chaumont, c'est la baston entre «feujs» et «Noirs». Le 21 juin, Rudy Haddad, 17 ans, est resté au sol

     

    Bleu, blanc, le drapeau israélien n'est resté accroché qu'une petite heure sur la passerelle qui enjambe la rue Petit, dans le 19e arrondissement de Paris. Mais la foule noire et blanche d'écoliers à kippa et d'écolières en jupe mi-mollet qui s'éparpillait à la sortie de l'école Beth Hannah - le plus grand centre scolaire juif d'Europe - s'est tout de suite massée sous l'étendard, presque stupéfaite par son audace. Sur le trottoir, les mamans laissent tomber le goûter et tentent de rappeler les petits : «Rentrez !» Deux jours après la longue après-midi d'échauffourées qui s'est terminée par le passage à tabac de Rudy Haddad, jeune «feuj» de 17 ans venu de Pantin, chacun surveille ses troupes, rue Petit.
    La rue Petit, c'est la «rue des Rosiers du 19e», sourit un commerçant. Une artère étroite et très longue qui fend un arrondissement de 200 000 habitants qui a beaucoup changé depuis une quinzaine d'années. C'est dans les années 1990, en effet, qu'une forte communauté juive, en grande partie loubavitch, s'y est installée. Venus de Sarcelles, d'Epinay-sur-Seine, de Gagny, ces banlieusards gagnent Paris «parce que victimes d'antisémitisme», raconte Mahor Chiche, responsable local de SOS-Racisme. S'y ajoutent des juifs du Sentier ou du Marais dépassés par la hausse des loyers et qui choisissent eux aussi ce quartier populaire.
    Mais la rue Petit a encore changé il y a cinq ans, lorsque nombre de ses taudis, où «il n'était pas rare de voir les familles maliennes faire la cuisine dans une marmite dans la cour», ont été réhabilités. Dans le jargon des associations, on parle de «gentrification». Dès qu'elles s'enrichissent, les familles passent le canal et remontent la rue Petit. Celles qui s'appauvrissent, au contraire, sont repoussées. «Regarde-les avec leurs Hummer !», persiflent deux jeunes blacks, ce mardi, en lorgnant les voitures familiales qui patientent à la sortie de l'école Beth Hannah. «Dans les permanences logement, on trouve les mêmes familles nombreuses et pauvres des deux côtés», rectifie Mao Peninou, conseiller de Paris et délégué aux questions de sécurité et de prévention à la mairie du 19e. Et souvent, dès 15 ans, les mêmes problèmes de «déscolarisation».

    Les 80 communautés de l'arrondissement ne se déclinent pas seulement au fil des cantines - «60% de demandes de repas différenciés, contre 15% il y a trois ans», note Mahor Chiche - ou des commerces.

    On est d'une rue, d'un coin ou même d'un trottoir. On vient de «Curial» ou de «Laumière». Ici, entre groupes de gamins, on dit «les Noirs», «les Juifs», les «Arabes», et on oublie les «Chinois, tellement ils sont calmes», explique un «Arabe» - c'est à Belleville qu'ils se battent avec les «Renois» (noirs). En revanche, entre l'avenue Jean-Jaurès et la mairie, on dit que «les juifs de la place des Fêtes sont très radicaux». Premier paradoxe : Ruddy a été retrouvé devant le square Petit fraîchement inauguré, juste en face de l'association de quartier «J2P» Jaurès, Pantin, Petit), censée calmer le jeu. «Si c'est si sensible, cette histoire, c'est aussi que tout le monde ici se dit qu'il s'est fait tabasser chez lui, dans sa rue», ajoute un riverain.
    Sa rue. Mon trottoir, mon banc, mon carré d'herbe verte pour bronzer ou draguer. Dans ce périmètre qui s'étend vers le nord du vaste parc des Buttes-Chaumont, tout est histoire de territoire. Le samedi après-midi, en attendant la fin du shabbat, à 17 heures, ils sont souvent plus d'une centaine, au pied du parc des Buttes-Chaumont, devant le restaurant indien l'Eléphant rouge, à l'angle de la rue de Crimée et de la rue Manin, là où les mamans loubavitch emmènent leurs enfants au manège. Dans ce coin, on aime «jouer à «West Side Story»», dit le député socialiste Jean-Christophe Cambadélis. Sur la carte d'état-major du 19e, chacun connaît sa position au mètre près. 

    «Tout est question de rapport de force. Le samedi, il est maximal», explique-t-on au commissariat du 19e. Ce jour-là, les juifs sont plus nombreux, et il suffit qu'un groupe de Noirs ou de Maghrébins passe sur le trottoir pour que ça s'emballe. Il y a un an, on a «sauvé» trois ou quatre Noirs, le terme n'est pas trop fort. Les autres jours, ça peut aussi bien être l'inverse, mais c'est plus calme.» Parfois, des hommes à chapeau et à nattes viennent tendre une kippa et tenter de rameuter les gamins à la synagogue, sans succès garanti. On préfère rester là, avec sa casquette de base-ball en guise de calotte, à fumer en cachette et à tuer le temps.
    Un oeil noir, un mot, un geste déplacé, et on s'échauffe. Une insulte aussi - «moi je vais l'enculer contre sa mère», a cru entendre «Greg» l'après-midi du drame, et c'est parti, on se course dans les rues adjacentes. Un feu vert que l'on fait manquer à une voiture en traînassant devant, et on repart. Un peu plus grave, un portable chipé, une kippa qu'on piétine, une chaîne en or qu'on arrache. Et on se déchaîne. Comme ce mardi 3 juin, où des ados se sont mis à démonter l'échafaudage de la mairie et ont «coursé avec les tubes des petits mômes noirs entre l'avenue Laumière et la rue du Rhin», raconte une conseillère municipale. «C'est pas la guerre des boutons, les mômes savent se battre !», confirme Joël Cacciaguerra, administrateur de J2P «Ce sont parfois des guerriers. Ils n'ont pas besoin de briller à l'école, ils ont besoin de briller dans la rue», ajoute Ludovic, autre habitant du quartier.
    «Ils ne sont pas forcément dans les trafics, contrairement aux bandes des cités», modère- t-on au commissariat, où on préfère parler de «groupes». Peu, en tout cas, portent plainte. Règne de la rumeur qui dévale la rue d'Hautpoul ou l'allée Darius-Milhaud, puis remonte les allées des Buttes-Chaumont, rapportée, déformée, amplifiée, comme ce 21 juin, premier jour d'été et de chaleur, mais aussi samedi de deuil, après l'élimination de l'équipe de France à l'Euro. «Les Renois, c'est le groupe le plus faible, le moins structuré. La seule fois où ils se sentent français, c'est quand on gagne un match de foot», note Pierre Kamety, ancien militant antiraciste et habitant du coin.
    Les malaises s'exaspèrent. «On ne peut plus les mettre à l'école non juive. Quand j'emmène mon fils au Leclerc, je lui dis : «Enlève ta kippa», explique Judith, 35 ans, mère de trois enfants. Nos fils, jamais ils disent «sale Arabe, sale Noir». Ce sont toujours les autres qui disent : «sale juif».» Réponse deux trottoirs plus loin de deux copains beurs, 17 ans chacun : «C'est vrai que les juifs, eux, nous traitent pas : ils veulent juste faire la loi. Nous, on a rien contre eux. On fait même ensemble de la boxe anglaise. Ils s'énervent juste un peu s'il y a un Arabe qui va avec une feuj.» Un grand black de 21 ans corrige : «Un jour, aux Buttes-Chaumont, on s'est battus contre des feujs. Il y en avait un qui était dans la même classe qu'un Noir, ils se sont reconnus. Eh ben le juif, il a continué. Il a dit : «Dans des moments comme ça, on ne se connaît pas.»»
    En vacances, peut-être, loin de la France, ils oublieront. Les Noirs resteront là, dans leurs cités, quelques juifs iront en Israël, les Arabes retourneront au bled. Les yeux de Y., un jeune beur, se mettent à briller. Ses mains entortillent un drapeau algérien. Le cadeau d'une fille rencontrée dans l'après-midi et qu'il a trouvé «trop belle», qui le lui a donné. Il le respire, l'enroule autour de son cou, comme d'autres avant lui avec un mouchoir en dentelle, puis finit par le cacher dans sa chaussette. Il fait rigoler sa bande : «On va le ranger, on ne sait jamais, si on se fait contrôler.»

     

     Claude Askolovitch
    Le Nouvel Observateur

  • "Promesses et jeu de dupes"

    Nouvel Observateur, 01 Août 2007


    Etes-vous satisfait de l'adoption par l'Onu de la résolution 1769 ?

    - On ne peut que se féliciter de cette adoption, faite à l'unanimité, qui prévoit le déploiement d'environ 26.000 soldats de l'Onu et de l'Union Africaine. Mais le problème, c'est qu'il s'agit de la 16è résolution depuis le début du conflit. La dernière, qui date du 31 août 2006, prévoyait déjà l'envoi de 20.000 casques bleus.

    On est toujours dans ce jeu de charme entre l'Onu et le gouvernement soudanais. Des dizaines de missives ont été échangées entre Khartoum et les secrétaires de l'Onu Kofi Annan et Ban Ki-Moon. Mais sur place, la situation ne s'est pas améliorée, l'armée continue de bombarder des civils. Chaque fois, le Soudan affirme sa bonne volonté, prend acte des résolutions et s'engage à les respecter. Puis la pression médiatique retombe, d'autres sujets sont en tête de l'actualité internationale, et Khartoum revient sur sa décision.

    Ces derniers mois, un cessez-le-feu a été respecté quelque temps. Mais depuis un mois, l'armée soudanaise a repris les bombardements. Ce qui a poussé George W. Bush, Nicolas Sarkozy et Tony Blair à mettre une forte pression et à engager le processus d'adoption d'une nouvelle résolution.
    Dans cette dernière mouture, le recours au chapitre 7 de la Charte des Nations Unies, qui prévoit en gros le recours à la force en cas de non-respect de la résolution, est prévu seulement en cas d'attaques de travailleurs humanitaires. Contrairement à la résolution de 2006, qui elle était contraignante, mais n'a pas été respectée pour autant. La recherche et la poursuite de criminels de guerre n'est même pas évoquée.

    Il y a une semaine, l'Onu a utilisé le terme de "nettoyage ethnique" pour qualifier ce qui se passe au Darfour, ce qui devrait de fait entraîner une intervention internationale. Mais pour obtenir l'unanimité des membres permanents de l'Onu, les négociateurs ont choisi de proposer un texte adouci, dont l'entrée en vigueur est prévue dans six mois, au 1er janvier 2008. On reste dans le domaine des promesses et du jeu de dupes.
    A titre de comparaison, rappelons qu'on a déployé 15.000 soldats en 15 jours au Liban. Le conflit au Darfour a commencé il y a quatre ans.

    Comment se fait-il que la Chine, qui s'opposait jusqu'à présent à l'adoption d'une résolution, ait finalement donné son accord ?

    - La Chine bloque le déploiement d'une force parce qu'elle est le premier partenaire économique du régime soudanais. Deux tiers de la production pétrolière du Soudan sont vendus à la Chine, ce qui représente 8% des importations en pétrole des Chinois.
    Pourtant, la Chine n'a jamais mis son veto à l'adoption d'une résolution. Son objectif est de retarder au maximum le processus, en soutien à son allié soudanais.
    Quand 104 parlementaires américains ont menacé, en mai dernier, de boycotter les Jeux Olympiques de Pékin, en cas de poursuite du génocide, la Chine a alors fait pression sur Khartoum.
    Le gouvernement chinois a très peur du renversement du gouvernement d'Omar Béchir. Cela pourrait lui faire perdre ses accords pétroliers avec le pays, et la présence de soldats pourrait créer des troubles dans les zones pétrolifères.

    Que faire alors pour aboutir à la véritable mise en place d'un processus de paix au Soudan ?

    - Deux mesures permettraient de lancer le processus. La première passe par l'application de sanctions contre le régime de Khartoum. On sait que ce qui fonctionne aujourd'hui, comme le prouve l'exemple de la Corée du Nord, ce sont les sanctions économiques. Isoler le Soudan, renforcer le pouvoir de la Cour pénale internationale pour lui permettre d'envoyer des observateurs sur place. Avant d'annoncer un hypothétique déploiement de Casques bleus, il serait pertinent d'appliquer les résolutions précédentes de l'ONU ainsi que les deux résolutions adoptées par le Parlement européen. Par exemple en interdisant le survol du pays, ce qui empêcherait l'aviation soudanaise de bombarder les civils. Ce serait plus efficace que d'envoyer sur place des soldats qui ne pourront s'occuper que de la sécurité des habitants qui se trouvent dans les camps. Rappelons que lors de la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy s'était engagé à prendre des sanctions unilatérales contre le Darfour. Une promesse qui n'a pas été tenue jusqu'alors.

    La deuxième mesure consiste à réunir les belligérants pour qu'ils trouvent un accord. Le principal chef des rebelles Al-Nur est actuellement à Paris. Si la France voulait organiser une telle conférence, elle le pourrait. De toute façon, la paix passe par une solution internationale. Au Darfour, la guerre est en quelque sorte déjà perdue. Entre 200.000 et 400.000 personnes sont mortes, 3 millions d'habitants ont été déplacés, 17 travailleurs humanitaires ont été tués depuis le début du conflit.

    www.sauverledarfour.org