Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

FRANCE-REPUBLIQUE - Page 23

  • La gréve des agents aéroportuaires et l'efficience des délégations de service public

    LE PLUS. La grève est un droit constitutionnel. Mais pour combien de temps encore... Des négociations qui traînent, les forces de l'ordre réquisitionnées, une nouvelle proposition de loi soutenue par le gouvernement pour limiter les actions des grévistes... Le droit de grève est en danger.

    Après onze journées de grève, les agents de sûreté aéroportuaire en grève (depuis le 16 décembre) dans les aéroports français ont décidé de poursuivre le mouvement, notamment à l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle. 
     

     La gendarmerie encadre les grévistes de l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle le 24 décembre 2011 (Mahor Chiche)

    Les fédérations FO, CFTC et UNSA du secteur ont décidé lundi 26 décembre d’accepter de terminer le conflit sur la base de la prime annuelle et la promesse d’ouverture de négociations ; la CGT en pointe dans ce conflit demeure hostile à la reprise du travail. Ce mouvement est, à de nombreux égards, instructif.

    Ce mouvement mobilise des agents de sociétés privés en charge de la sécurité des voyageurs, ce qui, malgré les dénégations, a pour conséquence de créer de nombreux retards pour les passagers.

    Le mouvement, qui réclame de meilleures conditions de travail et une augmentation de salaire mensuel de 200 euros brut, a d’ores et déjà obtenu la promesse d’une prime annuelle de 500 euros. Le salaire mensuel des agents de sûreté aéroportuaire est compris en moyenne entre 1 100 et 1 600 euros. Cette proposition n'a pas satisfait les grévistes, qui, malgré un semblant d’essoufflement et de lâchage par leurs syndicats, appellent à continuer le mouvement.

    Cependant, la crise aéroportuaire est avant tout le fait de mauvais choix stratégiques. Les directions des aéroports ont tardé à accepter la négociation et le gouvernement, qui souhaite éviter à tout prix le pourrissement du mouvement et l’image désastreuse de ses vacanciers mécontents en pleine trêve des confiseurs, a joué la fermeté. La ministre de l’Ecologie, du développement durable, des transports et du logement, Nathalie Kosciusko-Morizet, a ainsi assuré qu'il n'était "pas question de laisser les Français pris en otage par ce conflit à l'occasion des vacances de Noël". "Si la situation ne s'améliore pas, nous aurons recours à une solution appropriée" ; l’utilisation du terme "otage" étant censée dramatiser la crise (alors même que le trafic reste peu perturbé).

    Vers un nouvel encadrement du droit de grève

    Cette crise de Noël montre une nouvelle fois l’impossibilité du dialogue social préventif et la complexité du dialogue social en France où, à plusieurs reprises, les négociations ont été rompues.

    Arguant de l’existence de la loi du 21 août 2007 sur le service minimum dans les transports terrestres, le gouvernement va soutenir le 24 janvier 2012 une proposition de loi UMP visant à l’instauration d’un système similaire (dépôt de préavis de grève auprès de la direction) dans les transports aériens. Le texte sur "le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs" déposé fin novembre par le député UMP Eric Diard vise à rendre obligatoire la négociation préalable, la déclaration individuelle des grévistes quarante-huit heures avant le début du mouvement, dans les entreprises ou établissements qui concourent directement au transport aérien de passagers ainsi que la publication des prévisions de trafic vingt-quatre heures à l'avance.

    Le ministre en charge des Transports, Thierry Mariani, a estimé que "ce texte permettrait d'organiser le trafic aérien, d'informer en avance les passagers et ainsi d'éviter les engorgements (...), en conciliant de façon équilibrée, le principe constitutionnel du droit de grève, l'objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public ainsi que le principe de la continuité du service dans les aéroports".

    Pourtant, la législation actuelle prévoit déjà que les salariés des entreprises privées ayant une mission de service public doivent déposer un préavis de grève au moins cinq jours avant le début prévu des débrayages, ce qui a été fait dans le cas présent. Le dépôt de préavis n’a pas contraint la direction à négocier : voici sans doute l’unique élément du dispositif à améliorer. Plusieurs syndicats ont d’ores et déjà annoncé que cette loi provoquerait dès février prochain de nouvelles grèves.

    La réquisition des forces de l’ordre

    Les agents sont déterminés à obtenir gain de cause vu leurs conditions de travail. Ils ont très peu apprécié la réquisition de policiers pour effectuer leur travail dans deux terminaux de l'aéroport de Roissy. Alors même que le droit de grève est constitutionnellement protégé et que la détection de produits dangereux nécessite des formations spéciales dont ils ont bénéficié. Selon certains, la sécurité des voyageurs pourrait être moins bien assurée. Faute de formation, les policiers ne sont pas habilités à contrôler les bagages sur les écrans ; ils peuvent uniquement procéder à des palpations.

    En principe, l'article L.1251-10 du code du travail interdit le recours à des intérimaires ou à des contrats à durée déterminée pour remplacer des grévistes. La jurisprudence de la Cour de cassation va dans le même sens. Si cette réquisition est toujours possible au nom du principe de continuité du service public de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle et de l’atteinte à l'ordre public, ces réquisitions alors même que le trafic semble peu perturbé par ces mouvements constitue une atteinte au droit de grève.

    Le référé-liberté introduit devant le tribunal administratif de Montreuil pour "atteinte au droit de grève" a toutefois été rejeté au motif que cette mesure ne constitue "pas une atteinte au droit de grève".

    En effet, le juge des référés a "fondé sa décision sur le fait que le remplacement d'agents grévistes par des fonctionnaires de l'Etat, dont les missions sont d'assurer la sécurité des biens et des personnes, ne constitue pas une atteinte au droit de grève dans la mesure où aucune réquisition [de personnels grévistes] n'est demandée".

    La capacité des délégations de missions de service public

    A mon sens, la grande question posée par ce mouvement est ailleurs. La question que révèle ce mouvement est celle de la délégation depuis 1996 de notre sécurité aérienne à des sociétés privées (Securitas, Brink's, Alyzia Sûreté, Vigimark, Samsic, ICTS, etc.).

    En effet, peut-on confier à des sociétés de sécurité privées des fonctions de sécurisation relevant traditionnellement de la compétence régalienne de l’Etat ? Pour la majorité des passagers, ces tâches devraient demeurer des prérogatives de la force publique et ce sont ces policiers que l’on devrait former à la reconnaissance des substances dangereuses.

    Encore une fois, cette affaire illustre l’absence d’analyse des avantages-inconvénients des délégations de missions de services publics.

     

     

  • Le Droit de vote des étrangers et le piège du communautarisme

    Après trente cinq ans de combats pour l’égalité, le Sénat a adopté ce jeudi 8 décembre 2011 par 173 voix contre 166, une proposition de loi constitutionnelle étendant aux étrangers non communautaires le droit de vote aux élections municipales.

    Cette proposition de loi constitutionnelle n°505 relative au droit de vote et à l'éligibilité des résidents étrangers non ressortissants de l'UE avait été votée à l’Assemblée Nationale le 3 mai 2000. Le Sénat (composé d’élus locaux) avait toujours refusé de s’en saisir jusqu’au basculement à gauche de la majorité sénatoriale à l’automne 2011.

    Le droit de vote des étrangers extra-communautaires, une mesure juste et symbolique

    Contrairement aux allégations de Claude Guéant (« Si une personne étrangère souhaite voter et s’impliquer dans la vie de la cité, elle peut demander sa naturalisation. On ne peut découper la citoyenneté en tranches. »), et de Marine Lepen, la nationalité française n’est plus depuis le traité de Maastricht de 1992 liée à la citoyenneté.

    Cette dissociation entre nationalité et citoyenneté a été opérée sous l’influence européenne, permettant ainsi aux résidents communautaires (c'est-à-dire, ayant la nationalité de l’un des Etats-membres de l’Union) de participer à la vie politique locale de leur pays de résidence.

    Ainsi, en France seuls les étrangers extra-communautaires (hors Union européenne) ne bénéficient pas de ce droit. Cet état de fait constitue une discrimination que la gauche et les humanistes centristes ou de droite ont eu raison de soutenir. Cette mesure est juste et symbolique.

    Pour le sénateur socialiste François Rebsamen, « les étrangers non-communautaires en situation régulière doivent pouvoir voter aux élections municipales ».

    Cette proposition porte en elle : deux idées forces. Tout d’abord, le résident étranger qui participe à la vie associative, à la vie professionnelle, qui paie ses impôts et qui scolarise ses éventuels enfants en France participe pleinement à la vie de la Cité ce qui justifie l’octroi de ce droit de vote.

    Lors du débat sénatorial, la sénatrice communiste Eliane Assassi déclara « nous ne pouvons plus continuer à écarter du droit de vote et d'éligibilité des milliers de résidents étrangers qui participent (...) à la vie de la cité, à la vie associative, syndicale, culturelle, éducative, etc. ». Il participe souvent d’ailleurs aux élections professionnelles, prud'homales ainsi qu’à des Conseils de quartiers, de parents d'élèves ou des Conseils de résidents étrangers.

    La seconde idée est que si la naturalisation est encouragée par la France (bien que dans la réalité celle-ci s’acquiert de plus en plus difficilement), la conservation de sa nationalité d’origine n’interdit pas, dans un monde globalisé, l’intégration à la vie locale de son pays de résidence.

    Cette mesure va dans le bon sens, elle permettra à l’ensemble des résidents en France de participer (s’ils le souhaitent) à l’échelle locale à la vie de la Cité. Cette mesure rendra aussi une certaine fierté aux descendants de ces étrangers qui ont tout abandonnés pour travailler à la construction de la France sans en avoir les remerciements attendus.

    Le fait qu’un français résidant à l’étranger ne dispose pas forcément de ce droit n’est pas une raison de ne pas accorder un tel droit ; en la matière, il n’existe aucune obligation de réciprocité. Au contraire, cette mesure devrait permettre à la France de négocier l’octroi de tels droits pour les Français de l’étranger avec les pays tiers.

    Surtout, cette mesure démontre que la gauche de gouvernement (souvent accusée de trahison) tient parole même si c’est avec retard et qu’elle refusera de se soumettre aux diktats de l’extrême droite (malgré son poids électoral et idéologique indéniable).

     

     

     

    L'adoption de cette mesure ne doit pas justifier l’absence de volontarisme à améliorer les conditions d’accueil des étrangers et surtout à investir dans le changement de nos quartiers ghettos.

    Le communautarisme n’est souvent que la marque de la faillite de notre modèle républicain

    Le Ministre de l’intérieur, Claude Guéant, a eu tort de tenter de justifier le rejet de cette proposition de Loi relative au droit de vote et à l'éligibilité des résidents étrangers non ressortissants de l'UE par le danger communautariste. Le communautarisme n’est souvent que la marque de la faillite de notre modèle républicain.

    Pour Pierre-André Taguieff, le communautarisme est un mode d'auto-organisation d'un groupe social, fondé sur une « parenté ethnique » plus ou moins fictive (mais objet de croyance), dans une perspective ethnocentrique plus ou moins idéologisée, sur le modèle « nous versus les autres » (« nous » : les meilleurs des humains, les plus humains d'entre les humains).

    Les forces communautaristes proposent une vision essentialiste des groupes humains, ce qui signifie que chacun est doté d'une identité essentielle dont on suppose qu'elle est partagée par tous ses membres ou représentants. Comme l’écrit Alain-Gérard Slama, « l'idéologie identitaire substitue la subjectivité à l'intelligence, le particulier à l'universel ; elle exclut, par définition, le débat démocratique entre des individus autonomes et responsables ».

    Depuis des années, je dénonce avec d’autres l’existence de tensions intercommunautaires sur le territoire français, d’achat de la paix sociale par certaines municipalités et le financement d’associations communautaristes. Les exemples de concessions sont connus et nombreux.

    La montée en puissance du communautarisme est si puissante que l’on a réussi à créer de véritables quartiers ethniques.

    Le danger n’est pas comme aux Etats Unis un danger électoral puisque la plupart des candidats issus de la diversité présentant des listes communautaires font des scores minables.

    Le piège communautariste est ailleurs.

    Les quartiers et campagnes de France sont depuis des années délaissés, ils manquent d’emplois, d’équipements mais surtout de présence humaine (éducateurs, enseignants compétents, services publics…). Le creuset républicain, l’Ecole publique, ce sanctuaire a été bradé au profit des logiques de ghettoïsation.

    A l’évidence, la ségrégation scolaire apparue cette dernière décennie est le trait le plus saillant de cette victoire du communautarisme.

    Après les bandes ethniques, après les clubs de foot monocolores, les classes « ethniques » ont proliféré.

    Après les ghettos pour pauvres, on a eu les ghettos pour riches ; après l’école publique pour tous on a eu la prolifération des écoles privées et la myriade de structures relais privées de soutiens scolaires.

    Face au métissage de la société, il bien existe une tentation du développement séparé qu’il faut affronter au lieu de l’éluder.

    Les victoires communautaristes ne sont pas du à l’éventuel poids électoral de telle ou telle partie de la population, mais au renoncement de nos élus à promouvoir un modèle républicain vidé de sa substance.

    En effet, si le communautarisme tend aujourd’hui à se développer, la raison majeure en est la crise de confiance dans les institutions républicaines et l’absence de perspectives communes permettant de penser qu’Ensemble notre avenir sera meilleur.

    Après le 21 avril 2002 et les émeutes urbaines de 2005 les gouvernements de la France avaient la possibilité de sortir par le haut de ces crises, ils ont préféré les atermoiements (absence de plans sérieux pour les quartiers, pour l’école, absence de lutte contre les discriminations…), la communication (création du Ministère de l’identité nationale) au détriment d ‘une politique active.

    Face aux logiques individualistes, à l’appât du gain rapide et à l’absence de moyens, de réponses préventives ou judiciaires pertinentes, le modèle méritocratique atteint trop souvent ses limites.

    Ainsi, il faut se féliciter de l’adoption d‘un texte hautement symbolique qui pour entrer en vigueur nécessitera le paraphe du Président actuel ou à venir. La gauche ne doit cependant pas en rester à cette mesure symbolique, elle doit proposer des chemins d’intégration.

    Il convient de sortir des caricatures, de cesser d’éluder les véritables défis de la nouvelle France, et proposer des mesures fortes pour redonner du sens au modèle français.

     

     

     

     

     

  • Le 14 juillet 2011, une fête nationale citoyenne et métisséee

    Mon 14 juillet 2011 a commencé par la triste réalité des quartiers : incivilités et violences urbaines.

    Les Préfectures et le Ministère de l’intérieur ne diffusent plus les chiffres, mais la réalité des quartiers est cruelle. Voitures brûlées, cocktails molotovs, jets de pierre, tirs de lances fusées sur les balcons de voisins ou voitures de flics, les images sont dignes des émeutes de 2005. Depuis plusieurs mois déjà, on pouvait noter une recrudescence (dans un certain silence médiatique) des violences : attaques de commissariats, guerre de bandes… sans que cela n’émeuve les pouvoirs publics.

    Comme certains gardiens d’immeubles le disent : « leur fête nationale n’est pas la nôtre ». Cette violence, ce rituel obligé, n’apporte rien. Elle jette encore plus l’opprobre sur les quartiers difficiles et leurs habitants. Le ras le bol est profond ; les opérations « coups de poing » avec renfort de CRS et médias ne font plus illusion. L’insécurité et les incivilités quotidiennes restent un fléau français décourageant les bonnes volontés.

    Faire ce constat n’est pas stigmatisé c’est comprendre l’enjeu posé ; la France n’a toujours pas réglé la question de ses quartiers ghettos. La politique de la ville et sa résidentialisation améliore l’urbain mais ne change pas le quotidien. La crise de l’école, le manque d’éducateurs de rue, de moyens pour les associations de quartiers, l’absence de réponses judiciaires pertinentes, la force du communautarisme et de la ghettoïsation amplifient la rupture de confiance entre les populations de ces zones et l’idée de République.

    La France doit retrouver la force du projet républicain en lui donnant une déclinaison concrète.

    L’Egalité des chances, l’Egalité, ne doivent pas être de simples vœux pieux désincarnés, la France métissée est une réalité, ces enfants de la République ont besoin d’un nouveau projet de Vivre Ensemble prenant en compte cette nouvelle France.

    Les propositions existent mais depuis le 21 avril 2002 toute une génération se demandait si des victoires étaient encore possibles. Eric Zemmour, Brice Hortefeux, Claude Guéant rythment le détricotage de nos idéaux.

    Il nous aura fallu résister à « la lepénisation des esprits », au ministère de l’immigration et de l’identité nationale, aux tests ADN, aux discours de haine,

    il nous aura fallu protéger les enfants sans papiers,

    il nous aura fallu protéger les Lois mémorielles des tentations d’abrogation,

    il nous aura fallu combattre les Lois durcissant les conditions d’accueil des migrants en France,

    et il nous aura fallu apprendre à mener ces combats avec le plus grand nombre de partenaires dans le respect et l’unité.

    Les victoires furent trop rares, mais porteuses d’espoir ; la lutte contre les discriminations et ses « testing » est un bel exemple de réussite.

    Malgré tout, le prétendu lifting du FN, le développement de la Droite populaire, et la course d’Hortefeux et de Guéant derrière les électeurs FN a affaibli le cordon sanitaire posé dans les années 80 par SOS Racisme.

     « La France c'est nous »

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    De ce constat est né la volonté de renouer avec un grand rassemblement antiraciste pour réaffirmer à tous que les français restent partisans des valeurs républicaines à commencer par celle d’Egalité.

    Le Concert pour l’égalité s’inscrit dans la suite logique de la campagne "La France, c'est nous", lancée en 2010 par SOS Racisme en réaction au débat sur l'identité nationale initié par Eric Besson, alors ministre de l'Immigration et de l'Identité nationale.

    Depuis un an, partout en France, SOS Racisme travaille localement avec les associations de quartiers (ZY’VA…), les mouvements de lutte contre le sexisme (Oser le féminisme, NPNS…), l’homophobie (LGBT, SOS Homophobie…), l’antisémitisme et le racisme (UEJF, LICRA…) et les acteurs de la transformation sociale (UNEF, CFDT, CGT…). La liste atteint les 70 partenaires associatifs.

    Les organisations de défense des droits de l’homme (France Libertés…) et de solidarité avec les Révolutions arabes étaient également présentes ce 14 juillet 2011 sur le Champs de Mars.

    Ce 14 juillet a commencé par l’installation des stands dans une ambiance militante. Petit à petit, le village associatif pris forme. Militants parisiens ou de province, jeunes ou anciens, militants historiques ou militants fraichement débarqués dans SOS Racisme, en « backstage » ou en « diff » le dévouement et la détermination à faire de cet événement une réussite est puissant.

    Vu l’intensité des sentiments de fierté et de fraternité, de manière très subjective, et forcément non exhaustive, mes meilleurs moments de la journée furent : les retrouvailles avec les Potes de toute la France venus aider, assister à l’impressionnant déploiement des « schtroumpfs orange », le briefing géant de 12h00, les prises de parole des révolutionnaires arabes : Zineb El Rhazaoui (membre du collectif marocain du 20 février) et Lama Atassi (France Syrie Démocratie), le tour des stands associatifs avec Bertrand Delanoë, Eva Joly, Harlem Désir, et François Hollande, la glace partagée avec Myriam et Klug, ma discussion sur la transparence avec Eva Joly, l’attente devant l’accueil presse avec Florence Aubenas, la négociation des bracelets pour faire entrer les copains, le punch et le champagne du cocktail, les retrouvailles avec les anciens, la discussion avec Benabar sur son implication en faveur de SOS Racisme, le pied de scène avec Dom, et bien sûr ce formidable final : artistes et militants mélangés, unis, sur scène sur Let’s the sushnine (Laissons entrer le soleil).

     

     

    1 246 021 personnes présentes sur le Champs de Mars, le Président de SOS Racisme Dominique Sopo et son équipe ont gagné le pari. Réunir le jour de la fête nationale « tous ceux qui, face à une ambiance lourde, faite de libération de la parole raciste et de la stigmatisation de plus en plus décomplexée de fractions croissantes de la population, sont attachés au vivre-ensemble et refusent de voir se construire une société de haine de l'autre, de la méfiance, de la peur, de l'aigreur ».

    A 18h précises, le rappeur Big Ali avait ouvert le concert, accompagné de vidéos de SOS Racisme depuis sa création en 1984, tandis que des mains jaunes où est tracé le slogan «Touche pas à mon pote», symboles de l'association, étaient brandies dans le public avec des ballons rouges en forme de cœur. Au fond, la scène des enfants tenaient une banderole sur laquelle était inscrit «la France, c'est nous».

    Abd Al Malik, Anggun, Benabar, Big Ali, Enzo et Djenev, HK et les saltimbanks, Idir, Joyce Jonathan, Gregoire, Nolwenn Leroy, les Nèg'Marrons, Yannick Noah, Pascal Obispo, Shy’m, Soprano, une vingtaine d’artistes se sont succédés sur scène.

    Steevy Gustave, le grand organisateur, de cet événement est sur tous les fronts. Les artistes présents, les duos improbables sur scène c’est lui. Comme d’habitude son ami Hermann Ebongue est à ses côtés ; tout d’un coup le stress : Yannick Noah doit monter sur scène il n’a pas son T-shirt de « Bénévole SOS Racisme », je lui ai laissé le mien ; quelques minutes plus tard il n’y a plus assez d’alcool pour les artistes, vite il faut rapatrier l’alcool du cocktail pour les superstars présentes.

    Un Concert à 1,2 millions de personnes c’est une organisation où à chaque instant l’échec est possible. Annie, Ajah, Aline, Barbara, Blaise, Coralie, David, Delphines, Etienne, Gaëlle, Flora, Guillaume, Hadrien, Herman, Lassana, Layla, Loïc, Marouane, Mathieu, Marions, Myriam, Sarah, Simona, Steevy, Tristan, Victoria (…), les chefs d’équipe, les militants, le SO, vous avez été supers et ce jour là la famille SOS s’est honorée et a montré qu’elle existe !

    Comme la foule l’a scandé : SOS Racisme vit, SOS Racisme vivra !

    Ce spectacle était préparé depuis un an avec le formidable travail de très grosses et petites associations partenaires et du sens y a été donné grâce aux militants, au village associatif, ses débats, ses bars, ou encore ses spectacles urbains. 1,2 millions de personnes dans une ambiance « bonne enfant » épris d’Egalité et requinqués pour affronter les prochaines batailles.

    Les responsables politiques ne s’y sont pas trompés, il fallait être présent ce jour là pour entendre l’envie des Français d’Egalité, de Solidarité, d’Unité, de République.

    On a pu croiser : David Assouline (PS), Martine Aubry (PS), Roselyne Bachelot (UMP), Pascale Boistard (Mairie de Paris), Jean-Louis Borloo (Parti radical), Alexis Corbière (PG), Bertrand Delanoë (Maire de Paris), Harlem Désir (PS), Julien Dray (PS), Anne Hidalgo (PS), François Hollande (PS), Eva Joly (EELV), Jérôme Guedj (PS), Faouzi Lamdaoui (PS), Sandrine Mazetier (PS), Jean Vincent Placé (EELV), Danièle Simmonet (PG), Olga Trostiansky (Mairie de Paris) et de nombreux responsables syndicaux et associatifs.

    Après le formidable feu d’artifice illuminant la Tour Eiffel, les participants à ce Concert pour l’Egalité ont pu rentrer dans leurs villes plein d’images dans les yeux mais aussi plein d’énergie pour affronter les batailles du quotidien pour faire de l’Egalité la réalité de demain.

    Ce concert citoyen et métissé a rappelé que nous sommes majoritaires en France. Le militantisme ça sert et le vivre ensemble est possible ; la promesse de ne rien lâcher sera tenue !

    Pour moi, c’était mon meilleur 14 juillet. La France peut être fière d’avoir une nouvelle génération militante.

    Merci à tous les partenaires.

    Merci à tous les Potes.

    Nos Potes disparus auraient été fiers de nous Tous.

     Liberté, Egalité, Solidarité, Unité, République


     

     

  • Pour une gauche décompléxée

    A un an de l'échéance de 2012, de jeunes élus de gauche somment leurs aînés de réinvestir les champs "sensibles", tels la banlieue et l'immigration.

    Au lendemain du 21 avril 2002, une nouvelle génération politique s'est engagée pour réinventer le modèle républicain et faire barrage aux idées d'extrême droite.

    Pourtant, deux exemples de l’actualité récente, la question des quartiers populaires et celles des révolutions arabes, révèlent que la gauche demeure incapable d'aborder dans la clarté, le courage et la vérité des sujets dits "sensibles". L’exploitation démagogique de ces thématiques par la droite populaire et la peur d’alimenter la montée du Front National explique cette stratégie d’évitement et laisse la gauche tétanisée.  

    A un an de l'élection présidentielle, au moment où les appareils politiques de gauche finalisent leurs projets et envisagent des accords de gouvernement, c'est le "ministère du silence" qui domine.

    Le silence de la gauche dans l'affaire de la mort de Zyed et Bouna

    Le 27 octobre 2005 à Clichy-sous-Bois, deux adolescents, Zyed et Bouna, trouvaient tragiquement la mort après une course poursuite avec la police. Le 27 avril dernier, la Cour d'appel de Paris a rendu un non-lieu à l'égard des policiers, poursuivis pour "non-assistance à personne en danger". Cette absence de procès, tant attendu par les familles, laisse perdurer l'idée d'une justice à deux vitesses et empêche l'émergence d'une vérité judiciaire.

    Le silence des partis de gauche face à ce déni de justice est choquant et manifeste l'incompréhension de ceux-ci face aux espoirs des enfants de la République en quête d'égalité et de respect.

    L'analyse des émeutes de 2005, qui avaient embrasé les banlieues, n'a toujours pas permis à la gauche de régler son rapport aux quartiers populaires. Accusée d'avoir priviligié l’assistanat – "faire pour eux" –, la gauche éprouve des difficultés à imaginer des politiques de partenariats dans la durée – "faire avec eux" –, trop anxieuse d'être taxée de laxisme. Résidentialisation, vidéoprotection, polices municipales sont devenues les axes d'action en vogue de la gauche gestionnaire, négligeant la prévention. Alors que certaines collectivités de gauche ont mené des expériences innovantes, la question des discriminations, de l'école, et du vivre ensemble restent, à contrario, insuffisamment portées à l'échelle du débat public national.

    La gauche, qui n'a pas gagné l'élection majeure depuis François Mitterrand, devrait oser se réapproprier ces questions pour inventer avec les citoyens une nouvelle politique d'égalité. Les partis de gauche doivent continuer à croire en la richesse de nos territoires, refuser l'existence de zones de non-droit et demeurer intransigeants quant à la présence et l'exemplarité de la puissance publique.

    Les révolutions arabes restent incomprises

    La gauche française a également tardé à comprendre les enjeux des révolutions arabes en cours. Le soutien aux forces d'opposition a trop souvent failli en raison de la conviction profonde que les systèmes policiers en place assureraient la stabilité, et protègeraient les intérêts européens face notamment à la menace islamiste. Une frange des altermondialistes a, quant à elle, trop souvent préféré s'associer aux  fondamentalistes plutot qu'aux démocrates laïcs dans leurs combats pour les droits humains.

    La gauche est inaudible sur la politique migratoire, en raison des positions floues de ses différents leaders et de l'instrumentalisation de la question de l'immigration par la droite et le Front National. L'instabilité due aux transitions démocratiques favorise l'arrivée de migrants en France et oblige à repenser la question des flux migratoires, et à mettre un terme au fantasme "d'Europe forteresse".

    Ainsi, les migrants tunisiens venus avec des titres de séjour (visas Schengen) de Lampedusa à Paris via Parme, Marseille ou Nice, ont été surpris et choqués par leurs conditions d'accueil. Héros de la révolution du Jasmin pour certains, migrants économiques pour d'autres, ils ont été traités en clandestins sans droits. Les collectivités de gauche devraient se saisir de cette crise pour mettre en oeuvre une politique d'accueil respectueuse de la dignité des migrants, et servir de laboratoire d'idées et d'actions.

    Le courage de dire la vérité

    Militants loyaux, engagés dans la bataille de la prochaine présidentielle, nous pensons qu'une politique de gauche décomplexée implique le courage de chercher la vérité et de la dire. Nous demandons aux responsables de gauche de s’émanciper de la pression de la droite populaire et de l’extrême droite pour refonder le pacte républicain, et renouer avec sa tradition internationaliste.

    Face au retournement du monde, seule l'affirmation de nos valeurs rendra possible la victoire de la gauche en 2012.

     

    Ce texte est signé par de jeunes responsables de gauche

    Meziane Abdelali, Conseiller régional Ile-de-France et Maire-adjoint de Clichy Sous Bois (EELV)

    Nadège Abomangoli, Conseillère régionale Ile de France (PS)

    Julien Boucher, Conseiller municipal du 17ème arrondissement de Paris (PS)

    Mariam Cissé, Conseillère municipale, Clichy-sous-Bois (EELV)

    Mahor Chiche, ancien Conseiller municipal du 19ème arrondissement de Paris (PS)

    Benjamin Mathéaud, Conseiller municipal Alès (PS)

    Ali Soumaré, Conseiller régional Ile de France (PS)

    Judith Shan, Conseillère régionale Ile de France et Conseillère municipale de Boulogne Billancourt (PS)

     

    Le Nouvel Observateur, 3 juin 2011

    Soutenez notre collectif sur la page FB de Gauche Décomplexée