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QUESTIONS INTERNATIONALES - Page 8

  • Interpellation de Laurent Fabius et François Hollande sur le sort des Rohingyas

     

    Au Quai d'Orsay avec un collectif d'ONG pour les droits humains en Birmanie.

     

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    Madame, Messieurs,

    Je me présente, Mahor Chiche, Avocat au Barreau de Paris. Avec Sophie Ansel (écrivain et spécialiste de la Birmanie) et Rokhaya Diallo (journaliste-éditorialiste) nous avons lancé un appel d’une quarantaine de personnalités françaises et internationales (Eva Joly, Ramayade, Jamel Debbouze, Omar Sy, Noam Chomsky, Lilia Thuram, James Scott...) sur l’apartheid birman.

    Pour rebondir sur les précédentes interventions, je tiens à préciser qu’en effet (comme le montre les récentes positions de l’Organisation de la Conférence Islamique (OCI)) le silence des Chancelleries dans le monde sur le drame des Rohingyas renforce le sentiment auprès de nombreux Musulmans que parce qu’il s’agit de victimes birmanes musulmanes le Monde s’en désintéresse.

    A la veille de la visite du Président birman Thein Sein à Paris trois éléments me paraissent essentiels :

    - La Birmanie vit une apparente transition démocratique et la levée des sanctions économiques est en cours.
    La France renoue avec les échanges commerciaux et investissements en Birmanie au point que Madame Nicole Bricq, la Ministre déléguée au commerce extérieur, se rendra en Birmanie les 30 et 31 juillet 2013 ; Si ce processus peut aider à la transition démocratique il faut l’encourager, mais nous insistons pour que la question du sort droits de l’Homme et des Rohingyas soit au centre des discussions.
    Nous défendons l’universalisme des droits de l’Homme qui doivent être respectés dans l’ensemble de la Birmanie, mais aujourd’hui il existe une situation d’urgence dans l’Arakan où l’extermination de l’ethnie Rohingya est en jeu.

    - Si les lignes de démarcations entre partisans de la junte et démocrates restent fortes, sur la question des Rohingyas le silence des Démocrates est assourdissants comme celui d’Aung San Suu Kyi. Pour nous, la démocratie ne peut pas se bâtir sur les souffrances des minorités.

    La loi de 1982 qui déchoit de leurs nationalités Birmanes les Rohingyas et qui organise leur ségrégation, qui est sans doute illégale au regard des normes internationales, doit être abrogée.

    L’impunité des auteurs crimes de masses doit être dénoncée et une Commission d’enquête internationale indépendante créée disposant d’un accès libre sur le terrain, pour enquêter sur les crimes commis envers les minorités musulmanes de l’Arakan et particulièrement les Rohingyas.

    - La voix de la France doit porter celle, étouffée, des Rohingyas brimés, ségrégués, et désormais victimes d’un nettoyage ethnique. Depuis un an, aucun Chef d’Etat ou de Gouvernement n’a dénoncé le nettoyage ethnique des Rohingyas, nous demandons à ce que le Président François Hollande et le Ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius brisent publiquement le silence sur ce nettoyage ethnique.

  • Nous refusons le silence face à l'Apartheid et au nettoyage ethnique en Birmanie

    Depuis 2010, la junte militaire s'est retirée de Birmanie. Les ex-généraux promettent l'ouverture avec la mise en place d'un gouvernement civil et la libération d'Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix, aujourd'hui élue au parlement.

    Le pays donne les signes d'une marche volontaire vers la démocratie, mais nous ne pouvons ignorer les graves injustices qui subsistent. La Birmanie abrite près de 140 ethnies dont chacune apporte une empreinte fondamentale, unique et complémentaire donnant son identité inclassable à ce pays bigarré de langues et religions multiples.

    Aujourd'hui la démocratie birmane ne peut être bâtie que sur le respect, la réconciliation, et l'inclusion de toutes les minorités. Or, cinquante ans d'isolement, de peurs, de divisions interethniques et de propagande en Birmanie auront eu des effets dévastateurs et profonds sur la population birmane, fondant une nouvelle société ségrégationniste et raciste.

    Les minorités sont exclues du renouveau démocratique et, pour beaucoup, le calvaire a empiré avec des offensives militaires au nord et à l'Est tandis qu'à l'Ouest des populations sont séquestrées sous un régime d'Apartheid.
    Une campagne de nettoyage ethnique, lancée en juin 2012, cible aujourd'hui même, plus d'un million de Birmans musulmans. Parmi eux les Rohingyas, le peuple le plus persécuté au monde, selon les Nations Unies. Un rapport de Human Rights Watch d'avril 2013 dénonce la complicité du gouvernement birman dans les exactions commises par des gangs extrémistes massacrant des musulmans en toute impunité.

    Cependant, la communauté internationale ferme les yeux, galvanisée par le fantasme de l'avènement d'une démocratie birmane. Depuis un an, ce sont des milliers de villages musulmans qui ont été brûlés ou rasés tandis que continuent d'être perpétrés immolations, viols collectifs et massacres de masse.

    Aujourd'hui, 700 000 autres Rohingyas vivent dans la terreur dans l'Arakan et plus d'une centaine de milliers d'entre eux sont parqués dans des camps. En vue du recensement, les autorités qui souhaitent entériner l'exclusion de la nation des déportés Rohingyas les forcent à signer des papiers les identifiant comme "Bengali", faisant d'eux des étrangers.

    Ailleurs dans le pays, des extrémistes, fanatiques et ultranationalistes perpétuent une campagne visant à anéantir les 4% de musulmans présents en Birmanie.

    Nous, signataires de ce texte, dénonçons :


    - Les pogroms de masse visant les civils musulmans ;
    - L'impunité totale des nationalistes extrémistes, des soldats, et des moines qui commettent des crimes de masses et, dans le cas de la force spéciale Nasaka : des viols collectifs ;
    - La ségrégation systématique, le racisme et la terreur subis par les communautés birmanes musulmanes et l'absence totale de protection ;
    - Une campagne de propagande et d'incitation à la haine menée notamment par des moines extrémistes, tels Ashin Wirathu le "Ben Laden" birman autoproclamé, qui appelle au boycott des échanges avec les birmans musulmans ;
    - Une justice inexistante pour les birmans musulmans, des arrestations arbitraires et des procès inéquitables ;
    - L'entrave à l'aide humanitaire par la menace et l'interdiction d'accès aux zones où les musulmans ne reçoivent ni les soins ni les rations nécessaires à leur survie ;
    - La Loi discriminatoire de 1982 qui a fait des Rohingyas des apatrides et nie leur appartenance à la Birmanie.

    Pendant que l'Union Européenne lève les sanctions économiques, que les échanges d'affaires avec la Birmanie s'intensifient, que le président Thein Sein est reçu à Washington, et qu'Aung San Suu Kyi ne manifeste guère d'intérêt pour la situation, deux millions de personnes sont otages de la haine d'une partie de l'ethnie majoritaire. Le silence coupable de la communauté internationale condamne chaque jour plus de vies chez les Rohingyas. La démocratie ne peut s 'épanouir sur le sacrifice d'une minorité.

    Nous appelons le Président de la République françaises, les dirigeants européens et les représentants des nations unies à :
    - Interpeller fermement le gouvernement birman afin de faire cesser immédiatement les violations des droits humains et le nettoyage ethnique en cours en Birmanie.
    - Exiger l'ouverture d'une commission d'enquête internationale indépendante disposant d'un accès libre sur le terrain, pour enquêter sur les crimes commis envers les minorités musulmanes de l'Arakan et particulièrement les Rohingyas.
    - Apporter une assistance humanitaire et une protection immédiate à ces peuples sans voix courant le danger de l'extermination totale.

    Martin Luther King disait "celui qui ignore le mal s'en fait complice", face au nettoyage ethnique des invisibles de la démocratie birmane nous ne nous tairons pas.

    SignatairesSophie Ansel, écrivain et réalisatrice ; Rokhaya Diallo, éditorialiste ; Mahor Chiche, Avocat ; Maung Zarni, chercheur et activiste, Birmanie ; Noam Chomsky, philosophe ; Joe Sacco, journaliste et auteur de BD ; Omar Sy, comédien ; Lilian Thuram, président de la Fondation éducation contre le racisme ; Jamel Debbouze, comédien ; Eva Joly, députée européenne ; Rama Yade, ancienne secrétaire d'Etat aux droits de l'homme ; William Schabas, ancien président de l'association international des experts du génocide et professeur de loi internationale, Université de Middlesex ; Geoffrey Nice, avocat et militant ; Patrick Boitet, rédacteur en chef TV ; Juan José Tamayo, théologien ; Duleep de Chickera, évêque anglican ; Sam Garcia, dessinateur de bandes dessinées, auteur de " lunes birmanes" ; Habiburahaman, auteur rohingya "nous les innommables, un tabou birman" ; Mireille Fanon-Mendès France, présidente de la Fondation Frantz Fanon ; Doudou Diène, ancien rapporteur spécial des Nations Unies sur les formes contemporaines de racisme, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée ; François Durpaire, historien ; Frédéric Debomy, auteur et militant ; John Pilger, journaliste et documentariste ; James C. Scott, politologue et anthropologue ; Benedict Anderson, auteur ; Sai Latt, doctorant et activiste birman, Université Simon Fraser ; Leila Nachawati Rego, activiste syrienne, espagnole et professeur en communication ; Babylon Circus, musiciens ; Abdennur Prado, écrivain et directrice du congrès international du féminisme islamique ; HK et les Saltimbanks, musiciens ; Benjamin Bejbaum, fondateur de Dailymotion ; Veronica Pedrosa, journaliste TV ; Suthep Kritsanavarin, photographe ; Zebda, musiciens ; Pavin Chachavalpongpun, politologue, chercheur et enseignant ; Lynn Lee, réalisateur, "le génocide caché" ; Laurent Jais, producteur réalisateur ; Albert Lecoanet, journaliste indépendant & réalisateur de documentaire ; Bertil Scali, éditeur, auteur ; Saiful Huq Omi, photographe, réalisateur et activiste ; Professeur Dr. Mohammad Redzuan Othman, doyen de la faculté des arts et sciences sociales, Université Malaya de Kuala Lumpur ; Jeff Mc Mullen, écrivain et réalisateur ; Amal de Chickera, activiste des droits de l'humain


    Le Monde, 26 juin 2013

  • PS : La construction de l'Europe fédérale doit être l'horizon des socialistes français

    Au moment où le Parti Socialiste français organise sa Convention sur l’Europe, il m’est apparu essentiel de souligner l'importance de dépasser les questions de propositions techniques pour doter la France d'une ambition fédérale et d'une méthode.

    Il y’a un an nous nous retrouvions dans la section PS de Paris 19 en présence de Jean Christophe Cambadélis espérant la victoire du candidat François Hollande.

    Je l’avais alors interpellé sur l’importance de la promesse de renégociation du Traité budgétaire « MERKOSY », pour ne pas renouveler l’erreur de 1997 où Lionel Jospin avait promis de refuser la ratification du Traité d’Amsterdam - qualifié de « SuperMaastricht » - et au nom des règles de répartition des compétences entre le Président Chirac de l’époque et le Premier Ministre céda.

    Certains socialistes demandaient alors une cohabitation de combat. Elle n’a pas eu lieu. Cette volte face fut incompréhensible pour de nombreux électeurs.

    En avril 2012, Jean Christophe Cambadélis m’avais répondu que nous devions déjà gagner la présidentielle. Nous avons gagné, mais pour dégager des marges de manœuvres politiques le débat européen reste majeur. Le jour de son investiture le Président François Hollande s’est rendu en Allemagne et a rencontré la Chancelière Merkel, 5 jours après il acceptait de renoncer à renégocier ce Traité. En contrepartie, il obtenait, à l’issue du Conseil européen des 28 et 29 juin 2012, 120 milliards d’investissements pour la relance de l’économie européenne (somme dont attend encore le redéploiement).

    Cette absence de renégociation complète est décevante, mais les règles du droit international expliquent qu’une fois que le Traité a été signé par nos 26 partenaires il est difficile de revenir dessus. C’est pour cela que la victoire du SPD en Allemagne est souhaitable, il faut convaincre l’Allemagne de construire une Europe de croissance.

    Face à l’ampleur de la crise économique actuelle et de la crise institutionnelle ouverte après l’échec de la ratification référendaire de 2005, la question posée est celle de la légitimité démocratique de l’édifice européen que nous construisons.

    En 2005, le PS organisait une consultation interne où les adhérents socialistes se déclaraient en faveur du OUI, puis quelques mois plus tard le peuple français rejetait le Traité constitutionnel. Faisant fi de ce vote, le Traité de Lisbonne - « Constitution light » - fut adopté par la voie parlementaire. Les délégations de compétence, la souveraineté partagée comme disaient Chirac et Fischer ça n’a pas de sens, ça n’a plus de sens, aujourd’hui dans une Europe à 27. On parle de monnaie commune, d’un futur gouvernement économique, mais la souveraineté est indivisible.

    L’Union européenne prix Nobel de la paix 2012 ne fait plus rêver les peuples d’Europe. L’absence de choix clairs, la logique des petits pas, du statut indéfini, de l’entité sui generis, la promesse de Fédération d’Etats Nations d’Europe (formule Deloriste) est aujourd’hui le principal handicap de l’avènement de l’Europe politique.

    Le texte de la Convention socialiste sur l'Europe proposé est riche et certains amendements améliorent les dispositifs en particulier économiques proposés, mais il manque une vision, l’horizon fédéral. Il nous faut régler la question de la finalité du processus européen lancé à Maastricht en 1992 et qui devait faire une « Union sans cesse plus étroite entre les peuples d’Europe ».

     

    Quo Vadis Europa ? disait Daniel Cohn-Bendit. L’Union européenne est-elle un simple marché ? Un ensemble monétaire ? Une Union politique de peuples ? L’Europe a besoin d’un horizon défini.

    Le statu-quo actuel est mortifère, il conduira inéluctablement à un retour aux coopérations nationales et la montée des nationalismes.

    Le texte de la Convention pose d’ailleurs ce postulat du dépassement des obstacles actuels en affirmant « nous plaidons pour une Europe différenciée » (rupture historique avec la pensée socialiste d'une Europe marchant au même rythme), il nous faut proposer aux peuples d’Europe un nouveau dessein l’Europe fédérale. Peut être faudra-t’-il repenser la construction politique européenne en créant, à deux, avec l’Allemagne et quelques autres Etats volontaires une véritable Union.

    Aujourd’hui, seule l’Europe fédérale pourrait être une solution politique, mais il faut l’assumer. L’Allemagne est prête à des délégations de souveraineté et au « saut » fédéral, d’autres États européens pourraient être convaincus mais la France doit se redonner les moyens de réorienter la construction européenne en faisant de la construction politique la première priorité.

    Évidement, dans le climat actuel de montée des populismes et surtout du nationalisme d’extrême-droite comme en Grèce ou en Hongrie la bataille sera difficile. Mais, l’heure du choix de la forme future de l’Union européenne est venue.

    Si comme l’ont déclaré Harlem Désir et Claude Bartolone, nous voulons éviter un « 21 avril européen » en 2014 alors nous devons mobiliser les électeurs, nous devons leur proposer un vrai choix institutionnel et démocratique, nous devons combattre les droites conservatrices et les extrêmes droites.

    L’enjeu de notre génération est de sauver l’idée d’Europe politique.

  • La fausse couche provoquée par le prédateur Ariel Castro n’est pas un meurtre

    Après le soulagement de la libération des quatre captives d’Ariel Castro, la question de la peine de mort pour les auteurs de crimes est à nouveau posée aux Etats-Unis. Comme à chaque fois, après l’horreur, les lobbies pro-peine de mort se mobilisent. En annonçant tenter de requérir la peine de mort le procureur du comté de Cuyahoga (Ohio) Timothy McGinty a manifestement cédé à la pression populaire et aux lobbies.

    Le 8 mai 2013, Ariel Castro (52 ans) a été inculpé par le procureur du comté de Cuyahoga (Ohio) Timothy McGinty de viols et de quatre séquestrations : celles d’Amanda Berry (27 ans) et sa fille Jocelyn de 6 ans née en captivité, ainsi que Gina DeJesus (23 ans), Michelle Knight (32 ans).

    A Cleveland, le « prédateur sexuel » Ariel Castro a sévi jusqu’à ce qu’une de ses proies Amanda Berry ait réussi à s’échapper. Pour le procureur Bryan Murphy, « deux des victimes ont supporté un horrible calvaire durant plus de dix ans, une troisième durant près d’une décennie, et ce supplice a fini par donner naissance à une petite fille ».

    Douze ans de captivité, des tortures, des punitions, des viols la liste des horreurs est terrifiante, le procureur McGinty évoque une « chambre de torture » et une « prison privée au cœur de notre ville » opérée par « un kidnappeur d’enfants ».

    La fausse couche provoquée : un meurtre ?

    Selon CBS News, le rapport de police fait référence à au moins à une grossesse durant laquelle l’avortement a été forcé : « Ariel Castro l’a affamée pendant au moins deux semaines et lui a donné des coups dans le ventre jusqu’à ce qu’elle fasse une fausse couche ». Michelle Knight a semble -t’-il raconté être tombée enceinte au moins cinq fois.

    Le procureur Timothy McGinty envisage de requérir la peine capitale contre Ariel Castro. « J’ai l’intention de requérir des charges pour chaque acte d’agression sexuelle, de viol, pour chaque journée de séquestration, chaque agression criminelle, toutes les tentatives de meurtre et pour tous les meurtres aggravés qu’il a commis en interrompant les grossesses durant le calvaire que ses victimes ont enduré pendant une décennie ».

    L’article 2929.04 (Death penalty or imprisonment - aggravating and mitigating factors) du Code de procédure pénale de l’État de l’Ohio prévoit les infractions susceptibles de peine de mort (meurtres aggravés, assassinat du Président américain…). Les enlèvements suivis de meurtres entrent dans cette catégorie.

    Mais, en l’espèce, jusqu’à l’éventuelle découverte d’autres victimes décédées, les enlèvements de longue durée opérés et violences subies ne semblent pas suffire pour obtenir la condamnation à la peine capitale d’Ariel Castro.

    Le procureur va donc plutôt tenter de faire prévaloir les dispositions des articles 2 903 et suivants du Code de procédure pénale qui incriminent comme un meurtre le fait de mettre fin à la grossesse d’autrui. L’enfant à naître est ainsi considéré par les lois de l’Ohio comme « une personne » susceptible d’être victime de meurtre. La préméditation ferait entrer ce crime dans la catégorie de crime aggravé susceptible de donner lieu à des réquisitions et une condamnation par un jury à la peine capitale.

    A ce stade, on ignore le nombre exact de fausses couches intervenues et le stade auxquelles elles se sont déroulées. Mais le besoin de châtier l’horreur par la peine de mort conduit le Procureur Timothy McGinty à se concentrer sur cette une incrimination : le meurtre par fausses couches provoquées.

    Ainsi, cédant à la doctrine des anti-IVG, ce procureur assimile les actions d’Ariel Castro ayant conduit à l’interruption des grossesses de ses trois captives à des meurtres aggravés ; il assimile la perte de fœtus par l’interruption de grossesse - provoquées par les coups d’Ariel Castro et les privations alimentaires - à la mort de « bébés » personnes vivantes.

    Les lobbies américains réclament la peine capitale :

    La peine de mort est légale et régulièrement appliquée dans l’Ohio par injection létale, mais le gouverneur peut obtenir une recommandation non contraignante du Comité des grâces ou d’un comité aviseur afin de commuer une peine prononcée.

    La pression populaire, les lobbies anti-IVG ont sans aucun doute conduit le procureur (soumis à élections aux Etats-Unis) à faire preuve d’imagination juridique pour tenter de requérir la peine de mort contre le prédateur de l’Ohio Ariel Castro.

    Comme toujours les crimes d’enfants et enlèvements de longues durées choquent et font douter certains sur le caractère inacceptable de la peine de mort. Mais, il faut s’en tenir aux principes abolitionnistes et ce quelque soit l’horreur commise. Le calvaire fut atroce mais jusqu’à l’éventuelle découverte de corps d’autres victimes aucun meurtre n’a été commis par Ariel Castro. La loi de l’Ohio est par conséquent certainement contraire à la jurisprudence de la Cour suprême américaine.

    En effet, provoquer des fausses couches, priver de nourriture ses captives est horrible, mais les fœtus à naitre ne sont pas des enfants. Il est important dans cette période troublée et de propagandes de groupes anti-IVG de le rappeler.

    La quête à tout prix de ce procureur de parvenir « à requérir des accusations passibles de la peine de mort » risque bien de renforce le camp des anti-abolitionnistes ainsi que ceux des anti-IVG.

    Contrairement à ce que clame certains groupes de l’Ohio la vie humaine ne débute pas avec la fécondation. En effet, la Cour suprême des États-Unis a reconnu l’avortement comme un droit constitutionnel et estime que la vie commence au jour où « le fœtus peut se survivre à l’extérieur de la mère » (affaire Roe contre Wade, 1973). Et malgré l’adoption de lois restrictives sous les républicains et la fermeture de cliniques pratiquant les interruptions volontaires de grossesse dans plusieurs États, ce droit demeure aux États-Unis protégé constitutionnellement.

    Protéger la liberté des femmes de choisir entre avoir un enfant ou pas (les "pro-choice") reste une promesse à tenir de Barack Obama.

    Faire reculer le nombre d’États pratiquant la peine de mort reste notre combat à tous.