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PROFESSION AVOCAT - Page 8

  • Facebook ou la liberté d’expression du salarié, face à l’obligation de loyauté


    « Attention à ce que vous postez sur Facebook,
    cela pourrait se retourner contre vous tôt ou tard ".

    Barack Obama, Président des Etats Unis


    Lors d’un discours, le Président Barack Obama a mis en garde le peuple américain sur les effets négatifs possibles des nouvelles technologies du net et plus particulièrement des blogs, réseaux sociaux comme Facebook et autres Twitter.

    Récemment, dans de nombreux Etats la question de la censure de Facebook mais aussi de son interdiction sur les postes de travail s’est posée. Aujourd’hui, la vie d’un citoyen se décompose en trois sphères : la sphère strictement privée, la sphère publique, et la sphère professionnelle ; or parfois la frontière entre ses sphères est délicate.

    En France, le débat vient de rebondir sur la question des messages postés sur le réseau Facebook alors que leur contenu était critique vis à vis de la direction de la société qui employait les émetteurs du message.

    L’employeur a tendance à vouloir limiter le temps passé par ses salariés durant les pauses-cafés ainsi que les tentations de se connecter sur Internet durant les heures de travail. Plusieurs sociétés ont mis en place des filtres interdisant la connexion à des Sites tels que Facebook ou l’accès à certaines messageries comme Msn sur les postes de travail des salariés. L’Employeur veille ainsi au travail effectif de ses salariés.

    La motivation de l’employeur apparaît légitime : obtenir le meilleur rendement de son salarié et veiller à ce qu’il respecte son obligation de loyauté.

    Or, il apparaît que le temps passé sur le net au travail peut perturber la relation de travail. Le salarié doit exécuter ses fonctions sans être distrait. Le net a remplacé les appels téléphoniques personnels d’antan fait sur le compte de la société.
    Si l’Employeur veille ainsi au travail effectif de ses salariés, il semble bien démuni face au salarié-citoyen qui s’exprime sur Facebook sur sa vie professionnelle.

    Cette libre expression du salarié-citoyen relève t’elle de la sphère exclusivement privée ? Y-a-t-il confusion avec la sphère professionnelle ? L’employeur peut-il utiliser son pouvoir disciplinaire à l’encontre des salariés ? Cette liberté de parole a t’elle crée un trouble objectif caractérisé pour l’entreprise ?

    Ces questions montrent le fragile équilibre qui existe entre le domaine de la vie privée du salarié-citoyen et l’intérêt légitime de l’entreprise.

    1. Vie privée, vie professionnelle, vie  publique : une frontière de plus en plus floue


    En principe, un fait relevant de la vie privée ne peut caractériser une faute du salarié (Cass. soc., 17 avr. 1991, n° 90-42.636 : Juris-Data n° 1991-001156 ; Bull. civ. 1991, V, n° 201). 

    Le respect de la vie privée est un droit fondamental qui assure la dignité, l'intégrité et la liberté de l'être humain. La personne du salarié – et les droits et libertés qui y sont attachés – ne disparaît pas à raison du lien de subordination né de la relation de travail.

    Cette protection de la vie privée est prévue à l'article 9 du Code civil et englobe la protection de la correspondance privée. Correspondance papier ou électronique.

    L'employeur ne peut, sans méconnaître le respect dû à la vie privée du salarié, se fonder sur le contenu d'une correspondance privée pour sanctionner son destinataire (Cass. ch. mixte, 18 mai 2007, n° 05-40.803, P+B+R+I, A. c/ SA Haironville : Juris-Data n° 2007-038898).

    Les écrits diffusés sur un réseau communautaire virtuel relèvent assurément de la même protection. D’autant qu’en principe, l'accès aux informations personnelles des participants est en principe restreint aux membres de la communauté.

    La difficulté pour le juge est de parvenir à délimiter la sphère à laquelle relève les propos   tenus. La logique juridique ressemble alors à celle permettant en matière de droit de la    presse de distinguer l’injure privée de l’injure publique.
    En vertu de l'article L. 2281-1 du Code du travail, les salariés bénéficient comme tous    les citoyens d'un droit de s'exprimer « sur le contenu, les conditions d'exercice et l'organisation de leur travail ».

    La Cour de cassation a ainsi décidé que « le fait pour un salarié de porter à la connaissance de l'inspecteur du travail des faits concernant l'entreprise et lui paraissant anormaux, qu'ils soient ou non susceptibles de qualification pénale, ne constitue pas en soi une faute » (Cass. soc., 14 mars 2000, n° 97-43.268 : JurisData n° 2000-000983 ; Bull. civ. 2000, V, n° 104 ; RJS 2000, n° 388).

    Les écrits diffusés sur un réseau communautaire virtuel relèvent assurément de la même protection.

    Toutefois, le salarié reste tenu envers l'employeur d'une obligation née du contrat de travail qui est permanente et par conséquent se poursuit même en dehors du travail : c'est l'obligation de loyauté des parties dans l’exécution du contrat de travail.

    La jurisprudence a posé deux exceptions.

    Cette protection s'arrête lorsque les propos d'un salarié causent un trouble objectif caractérisé au sein de l'entreprise (Cass. soc., 20 nov. 1991 : Juris-Data n° 1991-003219 ; Bull. civ. 1991, V, n° 512) et lorsque la correspondance n'est plus privée, car elle est diffusée.
    L'employeur peut se servir de la correspondance privée d'un salarié pour le licencier, si le contenu du message a été révélé par l'un des destinataires qui s'en est plaint à l'employeur et qu'il y a trouble manifeste pour l'entreprise.

    2.L’obligation de loyauté du salarié

    Deux ex-salariés du groupe Alten ont saisi le Conseil des prud'hommes de Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine) pour contester leurs licenciements motivés par la publication depuis leur domicile sur Facebook de propos critiques sur leur hiérarchie par le biais de leur ordinateurs personnels.

    Sur leur page Facebook, les salariés écrivaient sur leur hiérarchie, la Direction des   Ressources Humaines et ironisent sur le fait d’appartenir à un "club des néfastes" ; deux autres salariées impliquées dans le litige s'en étaient amusées en répondant : "bienvenue au club".

    La direction d’Alten a alors invoqué les motifs d’« Incitation à la rébellion » et de « dénigrement de l'entreprise » pour justifier les licenciements intervenus. Notons que le licenciement est la sanction disciplinaire la plus grave.

    Me Grégory Saint-Michel, défend l'idée qu'il s'agissait là d'une conversation privée, du même type que celle qui pourrait être tenue autour d'un dîner, un soir, entre amis. Et qu'en aucun cas, elle ne devait sortir de ce cadre privé.

    Le Conseil des prud'hommes de Boulogne-Billancourt n’a pas réussi à trouver une position commune, l’affaire a été renvoyée en départage.
    En départage, et éventuellement en appel, les licenciements devraient être qualifiés de sans cause réelle et sérieuse en l’absence de trouble objectif caractérisé au sein de l’entreprise et du procédé sans doute déloyal de l’employeur pour avoir eu connaissance de ses propos.  

    La loyauté de l’information transmise à l’employeur demeure incertaine (sans doute émanant d’un autre salarié).  Il semble également que le terme « néfaste » ait pu être utilisé en premier lieu  par  la direction du groupe.  Les faits restent à apprécier et qualifier ; mais d’ores et déjà   il apparaît clair que les propos tenus sur Facebook (quelque soit  leur  retentissement) relèvent exclusivement de la vie privée.

    Cette affaire illustre à quel point l’apparition des nouveaux réseaux  pose à l’employeur de nouvelles questions quant à son mode de management et l’espace de liberté et d’autonomie conféré au salarié.

    3. Du juste usage des nouvelles technologies:

    Etre connecté à Facebook ou à un site d’actualité peut permettre de se détendre ; il remplace par certains égards la pause-café, ou les bavardages de couloirs. Temps de pause nécessaire au bien être du salarié et au final à une amélioration de ses performances.

    Les entreprises américaines et japonaises, et en particulier les start-up ont compris cette nécessité du développement personnel au travail pour obtenir le meilleur de ses salariés (salle de sport, coaching,  crèches d’entreprises…).
    Le temps de décompression, la pause, n’est pas du temps superflu pour l’employeur s’il permet une meilleure ambiance de travail. Le développement des maladies liées au travail montre qu’à long terme une ambiance sereine permet une meilleure croissance et réduit les risques psycho-sociaux.

    Certaines entreprises ont fait le choix de purement et simplement bloquer tout accès à Internet Facebook, Msn et autres privilégiant un Intranet. Evidemment, le tout est une question de dosage : le cadre qui passe 4 heures par semaine sur le net et celui qui en passe 40 ne sont pas dans le même type de comportement (amusement/addiction).

    A l’évidence, tout ne relève pas du judiciaire, et le salarié qui s’exprime sur sa société doit veiller à ne pas violer son obligation de loyauté.

    Le respect de sa hiérarchie et de la bonne organisation de l’entreprise relève avant tout de la responsabilité individuelle du salarié, ce que l’on pense et raconte entre amis ou collègues sur ses managers ne doit pas toujours faire l’objet d’un post.

  • Rebâtir la confiance dans la démocratie de Westminster


    Lors de son premier discours en tant que Premier ministre David Cameron déclarait « l’une des tâches qui nous attend, sans le moindre doute, est de rebâtir la confiance dans notre système politique ».

    Une nouvelle fois depuis l’avènement de la démocratie anglaise, la stabilité de la monarchie constitutionnelle est posée.

    La démocratie parlementaire britannique repose depuis toujours sur la toute puissance du parlement de Westminster et la culture du compromis entre les différentes forces politiques. Il crée la Loi et légitime le pouvoir du Premier ministre ; celui-ci est le chef du parti majoritaire à la chambre basse devant laquelle il est responsable.
    Le système électoral britannique et son scrutin uninominal majoritaire à un tour ("first past the post") a longtemps imposé un bipartisme. Ce bipartisme a été remis en cause en 1999 par les dévolutions d’Ecosse du pays de Galles et d’Irlande qui mêlent le scrutin d’arrondissement et la représentation proportionnelle, et intègrent de nouveaux partis nationalistes dans le jeu politique.

    Les élections générales de 2010 montrent que le système a échoué dans sa mission première : assurer des majorités stables et claires. L’émergence des "Lib-Dem" en tant que troisième force politique risque malgré la présentation de leur programme de gouvernement commun, de ressembler sur les sujets délicats (l'Europe, l'immigration, la sortie de crise), aux marchandages et accords d’appareils de la IVème République française.

    En neuf jours, une coalition Lib-Cons a pourtant formé un gouvernement s’engageant sur un « programme pour cinq années de gouvernement ». Un gouvernement, a deux têtes, Nick Clegg et David Cameron, a pris les commandes du pays. Pour affronter la crise économique et surtout pour redonner confiance au peuple dans ses institutions le challenge du nouveau cabinet sera de réformer les institutions en assurant une meilleure transparence et une meilleure représentation des courants qui traversent la société britannique. Sur la construction européenne, le compromis indique qu’aucun nouveau pouvoir ne pourra être dévolu à Bruxelles à l'avenir sans un référendum préalable.

    L'introduction d'une dose de proportionnelle a été demandée par Clegg et pourrait faire l’objet d’un referendum. Cette réforme du mode de scrutin risque de ne pas changer la situation et en leur temps, les travaillistes avaient promis de faire adopter un projet de constitution écrite, ils y ont renoncé.

    La décision du New Labour de soutenir l’intervention américaine en Irak, son incapacité à organiser le référendum sur l’Euro promis, et le scandale des notes de frais ont sans aucun doute été à l’origine du vote Lib-Dem.
    Cette campagne rentrera dans les anales de la politique d’Outre manche comme une des plus âpres. Avec ses premières comme les débats télévisés entre les trois candidats qui enflammèrent les cœurs britanniques durant trois semaines ; Avec ses coups de théâtre dramatiques, où une électrice travailliste s’est vue qualifier par Gordon Brown de « vielle bigote ».

    L’analyse des résultats est claire. Il n’y a pas eut un effondrement total du parti travailliste celui-ci arrive second et parvient à accaparer 258 sièges dans la Chambre des communes. Là déroute électorale n’est pas humiliante.


    Le troisième homme Nick Clegg, si populaire après sa prestation lors des débats, n’a recueilli quant à lui qu’un million de voix supplémentaires et a perdu 5 sièges au Parlement par rapport aux élections générales de 2005 (il obtient 57 sièges).

    On peut alors légitimement se demander : si cette coalition ne serait pas due au fait que Cameron n’a pas gagné suffisamment ? Il n'a réussi à rassembler que 36 % des suffrages ; n’est-il pas l’homme des demi-victoires ?
    Avant le scandale des dépenses du Parlement, Cameron était largement en tête et les analystes n’imaginaient pas un « Parlement suspendu ». Il obtient finalement 307 sièges.

    Cameron a échoué devant un Labour usé à la corde par treize ans de pouvoir. Demi-victoires parce qu’il est le leader d’un demi-parti divisé entre Thatchériens et partisans de la « Big society » inspiré de distributisme prêché par le manifeste « red tory » des partisans de Cameron.
    Cette rupture profonde au sein du conservatisme fait les beaux jours du parti eurosceptique UKIP, composé d’anciens aficionados de la Dame de Fer, et qui a privé pour ces élections générales, le parti Tory d’un million de voix.

    Ainsi, depuis des mois, on pouvait parier sur cette coalition Lib-Cons trop souvent présentée comme contre-nature. Historiquement, libéraux et conservateurs sont issus du même parti Whig, qui implosa à propos de la Révolution française entre partisans d’Edmond Burke et ceux de Thomas Paine. En réalité, la délimitation idéologique entre les deux doctrines fut toujours mince ; le « Ones nation » de Disraeli se qualifiait de social-conservatisme, et Churchill lui-même oscilla tout au long de sa carrière entre les deux partis.

    En 1974, face à « un Parlement suspendu », Ted Heath avait déjà tenté sans succès un rapprochement avec les libéraux. Harold Wilson composa un gouvernement minoritaire et il y eut des élections six mois après. Même Margaret Thatcher revendiquait une filiation avec le commandeur du parti libéral Gladstone.

    La stratégie de Cameron a consisté à faire évoluer le parti thatchérien, bien ancré à droite, vers le centre, comme le fit Tony Blair avec son New Labour. Cameron pourrait bien être tenté de recréer le parti Whig et de réunifier ainsi la famille conservative-libérale.

    Clegg et Cameron tendent vers la création d’un grand parti Lib-cons. C’est à cette condition que cette coalition pourra tenir à moyen ou long terme. Le bipartisme britannique n’est pas mort, il se revivifie de l’énergie que porte l’idée de troisième voie celle du centre.

    La question de la confiance dans le système politique n’est pas réglée et une simple réforme de scrutin risque d’être insuffisante.
    Indéniablement, sans doute à l’occasion d’un référendum constitutionnel, les Britanniques vont bientôt devoir retourner aux urnes.

    - Par Mahor Chiche Avocat à la Cour et Docteur en droit public
    et Jérôme di Costanzo, Analyste politique

    19 mai 2010

  • La Cour de cassation "juge" constitutionnelle la loi sur les crimes contre l'humanité

    La loi Gayssot du 13 juillet 1990 instaurant le délit de contestation de crimes contre l'humanité ne sera pas soumise au Conseil constitutionnel. La Cour de cassation a décidé, vendredi 7 mai, de ne pas transmettre la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur ce sujet, car elle ne présentait pas un "caractère sérieux".

    L'hebdomadaire d'extrême droite Rivarol a été condamné par la cour d'appel de Paris le 21 janvier 2009 pour "contestations de crimes contre l'humanité", pour avoir publié un entretien avec Jean-Marie Le Pen où le président du Front national estimait que l'occupation allemande n'avait pas "été particulièrement inhumaine".

    Les représentants du magazine ont soulevé une question prioritaire de constitutionnalité, avec l'appui du président du FN, également condamné. Les requérants estimaient que cette condamnation était "contraire aux principes constitutionnels de la légalité des délits et des peines ainsi que de la liberté d'opinion et d'expression".

    La loi Gayssot n'a jamais été soumise au Conseil constitutionnel. Sa constitutionnalité a été mise en doute par des juristes et elle a été critiquée par de nombreux historiens, comme les autres lois mémorielles sur le génocide arménien ou l'esclavage, provoquant un vif débat en 2005.

    "Tout a été dit sur le caractère liberticide de cette loi", a estimé l'avocat de M. Le Pen, Bruno Le Griel, qui a rappelé que la Cour de cassation avait invalidé, en 2009, une condamnation de Bruno Gollnisch, y voyant là "le chant du cygne de la loi Gayssot".

    Intervenant pour la Fédération nationale des déportés, Arnaud Lyon-Caen a estimé que la question n'était pas sérieuse car il était "inconcevable que le Conseil constitutionnel abroge la loi Gayssot", en rappelant que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) avait estimé qu'elle ne portait pas atteinte à la liberté d'expression.

    Il est revenu sur cette période de l'Occupation, qu'il a connue, avec une émotion rarement présente à la Cour de cassation : "J'allais accueillir les déportés gare d'Orsay ou à l'Hôtel Lutétia. J'avais l'espoir d'y retrouver mon père ou les onze membres de ma famille déportés. C'est ce souvenir qui m'a conduit à remplir mon devoir d'avocat dans les procédures concernant Barbie, Touvier, Papon. Si vous estimez que la loi sur la contestation de l'existence de ces crimes que vous avez réprimés est contraire à la liberté d'expression, vous allez choquer la mémoire des familles des déportés."

    Pour lever "les divisions et les doutes", l'avocate générale Anne-Marie Batut a demandé que la question soit transmise au Conseil constitutionnel. Me Lyon-Caen a repris la parole : "L'autorité de la Cour de cassation suffirait à mettre un terme à ces doutes."

    "C'est un jugement au fond"

    Message reçu par la Cour dans sa décision : "L'incrimination critiquée se réfère à des textes régulièrement introduits en droit interne, définissant de façon claire et précise l'infraction de contestation de l'existence d'un ou plusieurs crimes contre l'humanité (...), infraction dont la répression, dès lors, ne porte pas atteinte aux principes constitutionnels de liberté d'expression et d'opinion." "La messe est dite, explique Paul Cassia, professeur de droit à Paris-I, la loi est déclarée constitutionnelle par la Cour de cassation. C'est un jugement au fond."

    La décision risque aussi d'alimenter les accusations de résistance de la Cour de cassation à l'égard de la QPC. La Cour a néanmoins transmis trois questions. L'une porte sur l'indemnisation d'une victime d'un accident du travail, en raison d'une faute inexcusable de l'employeur, qui "connaît un sort différent de celui de la victime d'un accident de droit commun".

    Les deux autres concernent l'article L7 du Code électoral, bête noire des hommes politiques, qui prévoit une peine d'inéligibilité automatique de cinq ans en cas de condamnation d'un élu.

     

    Alain SALLES, Le Monde, 10 mai 2010

  • Les mères porteuses rejetées par la justice française

    La Cour d'appel de Paris a rejeté jeudi la demande d'un couple qui souhaitait obtenir la reconnaissance officielle de la naissance de deux enfants nés d'une mère porteuse aux Etats-Unis en octobre 2000.

    Cette nouvelle étape d'une procédure judiciaire déjà longue confirme que les magistrats français refusent d'introduire eux-mêmes l'avancée qui n'est possible que par une modification de la législation.

    La cour d'appel refuse la transcription sur les registres d'état civil français des actes de naissance établis dans le comté de San Diego et désignant les conjoints français comme père et mère des deux filles.

    La "gestation pour autrui" moyennant paiement est légale aux Etats-Unis mais pas en France où un débat est en cours sur cette pratique consistant à faire porter par une autre femme un embryon conçu in vitro.

    En l'occurrence, l'embryon a été conçu avec le sperme du conjoint français, Dominique Menesson, et l'ovule d'une amie du couple. Dans un premier temps, la justice française avait accepté une forme de reconnaissance de cette pratique en transcrivant les actes d'état civil.

    La Cour de cassation, plus haute juridiction française, a cependant annulé en 2008 ces décisions et renvoyé le dossier à la cour d'appel de Paris, qui a avalisé cet arrêt.

    On ne peut invoquer "l'intérêt supérieur de l'enfant", comme le font les époux Menesson, car cela reviendrait à valider a posteriori une procédure interdite par la loi française, dit la cour dans son arrêt dont Reuters a eu copie.

    Les époux Menesson conservent cependant une reconnaissance officielle de la filiation biologique sur leur enfant grâce aux documents officiels délivrés aux Etats-Unis, précise la cour. En pratique, ils seront reconnus comme les parents des deux filles.

    L'arrêt prend de l'importance au moment où sont envisagées une révision des lois sur la bioéthique et une possible légalisation de la gestation pour autrui.

    Un groupe de travail du Sénat a recommandé cette mesure en juin dernier. La secrétaire d'Etat à la Famille, Nadine Morano, y est favorable et a assuré qu'elle aurait pu y recourir à titre personnel si un de ses enfants le lui demandait.

    Reuters, Thierry Lévêque, édité par Gilles Trequesser