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Mahor CHICHE - Page 33

  • La Motion 5 : la motion de confiance

    Ce congrès révèle un certain rapport à la notion de confiance.

     

    La Motion 1 se contente de nous dire : « Ayez confiance, ayez confiance , mais laissez nous gérer tout parce qu’on s’occupe de tout ». La situation est sous contrôle et laissez les importants faire les choses importantes : s’arranger, désigner et placer et ensuite « circulez il n’y a rien à voir ». Et partout le même refrain implicite. Si tu n’es pas dans le rassemblement imposé, alors gare à tes ambitions pour les instances locales, fédérales, nationales, voire municipales ou régionales. Curieuse façon de rassembler par la pression implicite. Tu veux un poste, alors attention, laisse faire les « posteurs » professionnels. C'est la pression de confiance ! 

    La Motion 2 nous explique elle qu’elle n’a pas confiance dans notre parti et qu’il faut se tourner vers un nouveau modèle, un nouveau paradigme : l’écologie. J’ai beau être sans doute plus écolo que bien des écolos en roulant notamment en vélo depuis 15 ans dans Paris, je trouve toujours bizarre que des socialistes nous expliquent que l’avenir du socialisme c’est l’écologie pure et simple. Si on doit devenir écologiste, il y a un parti qui a été créé pour cela non ?

    Les Motions 3 et 4, elles montrent qu’après 3 mois de gouvernement, elles n’ont pas vraiment confiance dans l’action engagée puisqu’elles proposent déjà des mesures alternatives, comme si après 3 mois de gouvernement, les 60 propositions étaient déjà caduques et qu’il fallait penser maintenant un autre programme. Quand on écoute notre télévangeliste économique qui est passé par toutes les couleurs de l’arc en ciel partisan de la gauche avec ses éternels graphiques, on se dit qu’on est vraiment trop con de n’y avoir pas pensé plus tôt. La solution mais c’est bien sûr et hop le chômage rayé de la carte comme une vulgaire courbe d’un graphique ! 

    La Motion 5 elle propose un rapport très positif à la notion de confiance. 

    Nous avons confiance dans nos valeurs

    du socialisme et de la République.

    Cette confiance dans nos valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité, mais aussi de laïcité nous rappelle que dans notre société de plus en plus fractionnée, la plus belle des appartenances et la seule qui vaille en République c’est la citoyenneté. Et qu’au delà de notre belle fête nationale, il reste bien des moments à inventer pour célébrer cette belle appartenance. 

    Nous avons confiance dans l’Europe.

    Parce que si bien des politiques ultra-libérales ont été conduite en son nom, l’Europe reste notre destin commun sur le plan économique d’abord mais aussi politique. Et c’est cette Europe politique que nous appelons de nos vœux pour sortir de nos frontières. Pour inventer l’Europe politique il faudra déjà renforcer notre Europe partisane et nous proposons de renforcer le PSE en organisant notamment des primaires européennes pour désigner qui sera le prochain candidat de l’Europe progressiste à la commission européenne. Nous faisons confiance en François Hollande pour orienter l’Europe dans la bonne direction avec les rapports de force qui sont ceux d’aujourd’hui et ceux que nous espérons demain. Voter contre le TSCG n’est pas du socialisme, c’est de l’onanisme. On se fait plaisir. Seul. Dans son coin. Sans lendemain. Et faire tout le congrès sur le TSCG c’est encore plus ridicule parce que dès Toulouse cette question sera derrière nous.

    Nous avons confiance dans le gouvernement

    que conduit Jean-Marc Ayrault.

    Donner des signes d’impatience au bout de trois mois est puéril et nous ne sommes pas là pour trépigner mais pour accompagner et expliquer. Le programme sera accompli et nous avons 5 ans devant nous et nous espérons tous que le cycle ouvert en mai 2012 pourra durer au moins 10 ans. D’ailleurs les initiatives médiatiques et les prises de position de députés impatients et trépigneurs viennent  tous de la Motion 1 ! Ces petits positionnements sont-ils utiles ? Je ne le pense pas ! François Hollande dans tous les congrès socialistes qu’il a gagné a toujours expliqué que nous devions penser notre action dans la durée. Il le pensait quand nous étions dans l’opposition. Il l’applique en étant aux manettes et cette nouvelle forme de gouvernance est effectivement une manière moderne de gouverner. Le sarkozysme n’aura été qu’un bougisme et vouloir singer l’ex-président n’a pas beaucoup d’intérêt. D’ailleurs Jean-Marc Ayrault en lançant un nouveau cycle de relations contractuelles basé sur un travail de long terme avec les partenaires sociaux est en train de réinventer la démocratie sociale et nous en verrons les effets sur le long terme pas dans des effets d’annonces qui ne servent à rien.

    Nous faisons confiance dans la jeunesse.

    Nous pensons que notre société vit un véritable crise de confiance avec sa jeunesse. François Hollande a eu cette intuition pendant la campagne des primaires et ensuite pendant la campagne présidentielle. La priorité donnée à l’éducation et le volontarisme de Vincent Peillon ou la création des emplois d’avenir vont dans ce sens mais il y a encore tant à faire. Il faut se rendre compte à quel point notre société a infantilisé toute une génération. Et je sais de quoi je parle. J’ai 44 ans et je milite depuis l’âge de 20 ans. Nombre de responsables politiques m'ont toujours parlé et me parlent encore comme si j’étais un jeune freluquet qui devait patienter pour prendre des responsabilités. Le groupe socialiste s’est renouvelé pour moitié de ses effectifs lors des dernières élections législatives. Et pourtant, moins de 10% de ses effectifs ont moins de 40 ans. En 1981, c’était un tiers du groupe socialiste qui avait moins de 40 ans. En Espagne, en Allemagne, en Hollande, au Royaume Uni, ce sont 30% à 50% des parlementaires qui ont moins de 40 ans. En 1977, un certain Jean-Marc Ayrault devenait maire d’une ville de plus de 30 000 habitants à 27 ans. Dans quelle fédération aujourd’hui notre parti serait prêt à faire un tel pari sur l’avenir ? Cette situation d’infantilisation de cette génération 68 qui tout en ayant 60 ans se considère encore comme éternellement porteur des valeurs de la jeunesse doit cesser.

     Faire confiance à la jeunesse, cela commence par traiter ce fléau du chômage des jeunes. Cela consiste à faire confiance à des 20/40 ans pour diriger des entreprises, des syndicats, des associations, des journaux, des institutions culturelles, des collectivités locales. Parce qu’au cœur de l’abstention très forte de ces catégories d’âge, il y a ce rapport insupportable d’une société politique, économique et médiatique qui est incapable d’avoir la moindre confiance dans la jeunesse. C’est parce que nous avons confiance dans cette jeunesse que nous avons fait le pari de faire conduire notre motion par la benjamine du Conseil National, Constance Blanchard.

    Nous avons confiance dans l’égalité Femmes/Hommes. 

    Sur cette question, nous voulons sortir d’une guerre des sexes basée sur la conflictualité tout en considérant que nous devons désormais accélérer ce qui aurait déjà du entrer en vigueur. La loi sur la parité a été votée en 2000. 3 législatures plus tard, nous venons tout juste de franchir le cap du quart de femmes élues au parlement. Et si l’effort du PS est conséquent et pèse lourd, en présentant 50% de candidates, il n’a cependant fait élire que 36% de députées.  Sur ce terrain là nous sommes là encore loin de tous les parlements européens. Très loin même. Et nous sommes loin derrière l’Assemblée tunisienne ou algérienne !

    Alors cessons avec cette comédie des amendes qui ne servent à rien et mettons en place un mode de scrutin bi-nominal pour les élections législatives comme pour les élections cantonales et en 2017, nous pourrons dire la parité c’est maintenant et c’est partout. 

    Nous avons confiance dans la vitalité intellectuelle, politique et militante de la grande famille des militants et sympathisants socialistes.

    Leur faire confiance c’est d’abord les associer à tout le travail d’élaboration politique. Jean-Louis Missika vient de présenter à Paris la méthode que compte utiliser Anne Hidalgo pour élaborer avec les parisiens son programme, notre programme. Jean-Louis a parlé de co-working qui utilise d’abord l’accès au numérique et qui permet à tous ceux qui ne pourront jamais perdre de temps dans des réunions à des horaires impossibles de partager points de vue, idées, remarques, suggestions. Parce que la politique est un monde très difficile d’accès à tout individu investi professionnellement ou familialement, à travers la formidable perte de temps en réunionites inutiles, penser la politique à travers l’usage d’internet est une source de rééquilibrage des investissements humains en politiques. Parce que l’intelligence n’est jamais aussi belle et puissante que quand elle est partagée, il y a tout à inventer en la matière et c’est peu dire que les mœurs verticaux d’élaboration collective de notre parti ont au moins un siècle de retard. Notre parti doit entrer dans le 21ème siècle en sortant de ces schémas ou une poignée de personnes travaillent en catimini pour balancer des textes, toujours les mêmes et les faire voter sans aucun intérêt car sans la moindre démarche d’alternative ou d’amendement. Notre parti a su avancer à tâtons sur la marche de la démocratie participative, des Etats Généraux de Michel Rocard, aux débats participatifs de Ségolène Royal. Il doit reprendre cette marche vers l’intelligence partagée, l’intelligence collective parce que notre parti recèle d’immenses talents totalement sous-utilisés, sous évalués. Avec cette méthode Jean-Louis Missika invite à Oser Paris pour faire gagner Anne Hidalgo. Et bien ayons l'audace de proposer d'Oser le Parti du 21ème siècle pour le faire gagner dans toutes les prochaines échéances. Les campagnes présidentielles de Ségolène Royal et de François Hollande ont ouvert le champs des possibles. Le PS 2.0 est devant nous. 

    Mais faire confiance aux adhérents et aux sympathisants, c’est aussi leur faire confiance pour faire ce à quoi sert un parti : sélectionner une élite politique et des candidats aux suffrage universel.

    Aujourd’hui nos candidats aux législatives, nos candidats aux têtes de listes pour les régionales et municipales, nos candidats pour être secrétaire de section, premier secrétaire fédéral, premier secrétaire national sont tous désignés directement par les militants. Notre candidat à la présidence de la République a même été choisi parce que notre parti a fait confiance dans les 3 millions de sympathisants. Alors cette façon de choisir nos candidats et responsables doit être généralisée et la cooptation clanique doit sortir de nos écrans radars. Tout responsable ou candidat doit être désigné directement par les adhérents ou les sympathisants. Plus jamais une désignation comme celle que nous venons de vivre à travers le triste match Camba-Désir ! Les militants ont toutes les clefs pour faire les bons choix alors désormais ils doivent désigner tous les membres des CA, des CF du CN et tous les candidats à nos élections. Il faut cesser ce rapport moyen-âgeux où les grands chefs désignent les sous chefs qui désignent les petits chefs. Le chef, ce doit être le militant qui doit toujours avoir le dernier mot pour désigner qui le représentera à l’intérieur comme à l’extérieur. Et cela peut se faire en respectant les notions de motions pour ceux qui tiennent tant à ce système au moment même où il n’a plus aucun sens si tout le monde est dans la même motion ! Parce que nous avons confiance aussi dans l'émergence de talents locaux, le parachutage doit désormais être proscrit.  

    Nous faisons confiance aux secrétaires de section.

    Ce sont eux qui sont les soutiers de notre parti. On leur doit bien de nos victoires. Ils gèrent temps, conflits, relations humaines, planning, organisation le tout bénévolement. C’est parce qu’ils sont les véritables piliers de notre parti que nous proposons qu’un tiers du CN leur soit réservé et que désormais des moyens financiers et humains soient mis à leur disposition pour les soutenir dans leur action, à l’échelon des circonscriptions. 

    Nous avons confiance dans les élus socialistes.

    Et c’est parce que nous voulons des élus efficaces, dynamiques, créatifs, investis pleinement dans leur mandat que nous plaidons pour le non cumul. Plaider le non cumul n’est pas de l’antiparlementarisme ou de la démagogie mais au contraire une immense confiance dans le travail que peut faire un élu. Parce qu’il y a tant à faire dans un parlement, il faut justement se consacrer à ce travail intense qui consiste à penser, à légiférer et à contrôler. Un tel travail est incompatible avec le papillonnage. Le cumul est un mal français et il est à l’origine des blocages sur la parité ou le non renouvellement générationnel. Mais être anti-cumul dans l’espace comme dans le temps, cela suppose des élus qui disposent de moyens supplémentaires, d’un statut et de portes de sorties pour que cette belle période de leur vie ne soit pas suivi d’un enfer professionnel. Etre élu ne doit ni être un métier, ni être réservé aux seuls fonctionnaire. Cela doit être une mission bornée dans le temps. Une mission au service de la République. Au service des autres.

    C’est parce que nous avons confiance dans le travail d’élu que nous proposons également un observatoire de nos politiques locales afin de théoriser, d’échanger et de valoriser nos laboratoires que sont toutes les collectivités locales. 

    Nous avons confiance dans la République, confiance dans l’Europe, confiance dans le gouvernement, confiance dans la jeunesse, confiance dans les militants, confiance dans les sympathisants, confiance dans nos responsables locaux, confiance dans nos élus territoriaux. Alors nous pensons que la meilleure façon non seulement d’accompagner le gouvernement, mais de préparer toutes les prochaines échéances locales comme nationales, c’est de faire confiance dans un parti qui débat, dans un parti qui co-produit, dans un parti qui vote, dans un parti qui choisit, dans un parti qui tranche, dans un parti qui travaille et pas seulement en haut mais à tous les niveaux. Le plus beau pari de la confiance, c’est d’oser le beau pari de la démocratie.

    Alors le 11 octobre, oubliez calculs, pressions et chantages en tout genre pour vous concentrer sur l’essentiel : quand vous serez seul dans l'isoloir, alors votez la Motion de confiance. Votez la Motion 5 pour que Toulouse soit vraiment ton congrès !

  • Pérenniser le ralliement des socialistes au suffrage universel direct

     

    Martine Aubry a annoncé que le prochain Premier Secrétaire du Parti Socialiste serait désigné le 12 septembre lors du Conseil National du parti. Ce choix révolte les adhérents et révèle un net recul démocratique par rapport aux pratiques des derniers congrès.

    La désignation collective du Premier Secrétaire

    A la veille de l'élection présidentielle, en janvier 1981, lors du congrès de Créteil François Mitterrand confia la Maison socialiste à Lionel Jospin. Les adhérents n’avaient alors pu qu’entériner ce choix.

    Dans les années 90, Laurent Fabius (janvier 1992), Michel Rocard (octobre 1993), Henri Emmanuelli (juin 1994) se sont fait désigner Premier Secrétaire lors de Conseils Nationaux houleux durant lesquels tentatives de déstabilisation et alliances de circonstances entre courants permirent leurs succès momentanés. Les enjeux de pouvoirs internes se réalisaient alors dans ce Parlement qu’est le Conseil national du PS.

    Ces querelles d’écuries sans enjeu idéologique lassèrent et Henri Emmanuelli innova en proposant l’élection au suffrage universel direct du candidat à la présidentielle alors même que depuis 1958 les socialistes rejetaient l’élection du Président par ce mode de scrutin.

    La présidentialisation du PS

    La primaire interne Jospin-Emmanuelli pour la désignation à la candidature à la présidence de la République de 1995 fut le premier moment démocratique interne où l’affrontement programmatique entre les deux leaders fut réel. L’incarnation du rôle de candidat à la présidentielle par Jospin lui permit de l’emporter aisément avec 65,85 % des voix. Fort de ce succès, Lionel Jospin cumula alors la direction du PS et celle de candidat à la présidence.

    Ce scrutin interne marque un tournant dans l’histoire du Parti Socialiste, en effet pour la première fois ce n’est pas le Conseil National qui a fait ou défait un Premier Secrétaire, mais ses adhérents. Cette évolution témoigne du ralliement de la très grande majorité des socialistes à l’idée que démocratie et élection au suffrage universel direct vont désormais de pairs.

    Lors du Congrès de Brest, en 1997, l’unité du parti socialiste se réalisa autour de François Hollande ; Jean Luc Mélenchon - tenant à l’époque de l’aile gauche du PS – l’affronta mais n’obtint que 9 % des voix.

    En 2008, lors du congrès de Reims, plusieurs prétendants à la direction du PS - Martine Aubry, Bertrand Delanoë, Benoit Hamon, Ségolène Royal - déposèrent des motions. Bien qu’arrivée en tête des motions, Ségolène Royal ne parvint pas à faire l’unité autour de sa candidature pour le poste de Premier Secrétaire. Les adhérents socialistes durent donc voter pour la départager de Martine Aubry. Les résultats furent serrés et les soupçons de fraudes nombreux. Finalement, Martine Aubry  fut désignée Premier Secrétaire avec 50,04 % des voix soit avec seulement 102 voix d'écart.

    En juin 2010, les statuts du PS ont été modifiés en ces termes : « Pourront être candidat-e-s au poste de premier secrétaire, les premier-e-s signataires des deux motions arrivées en tête au premier tour » afin d’éviter la répétition de ce type de duel personnalisé. 

    Aujourd’hui, le PS prépare son congrès de Toulouse suivant cette nouvelle règle ; mais la désignation du Premier Secrétaire se joue en coulisse. Jean Christophe Cambadelis a fait le choix d’une campagne discrète, tandis qu’Harlem Désir qui a été Premier Secrétaire par intérim lors des primaires enchaîne les médias.

    Pérenniser le recours au suffrage universel

    Après le succès de la transparence des primaires désignant François Hollande à la course présidentielle par quatre millions d’électeurs,  le retour aux vielles pratiques a - comme l’a dit Julien Dray - un caractère « ubuesque ». Tandis qu’Arnaud Montebourg considère que les primaires sont réservées pour les sujets « importants », Harlem Désir s'est déclaré favorable à un « vote libre et ouvert où tout candidat pourra se prononcer » quelque soit le candidat proposé par Martine Aubry. « C'est ce vote des militants, ce vote démocratique, qui donnera toute sa légitimité au prochain secrétaire du PS ».

    Depuis 1995, les scrutins internes permirent de désigner démocratiquement des leaders en dépassant les écuries présidentielles. Au moment où le PS imagine étendre les primaires aux désignations internes pour les municipales de 2014 et que l'UMP met en place « des primaires » pour se trouver un leader, il est regrettable de voir la direction du PS s’accrocher à cette règle adémocratique.

    Le président de la région Rhône-Alpes, Jean-Jack Queyranne, a eu raison de dénoncer un processus de désignation « obscur » « à la nord-coréenne ». Les adhérents doivent pouvoir désigner leur leader, et si les statuts ne le permettent pas c’est qu’ils sont mauvais. Choisir directement son Premier Secrétaire au suffrage universel direct est le choix le plus démocratique combien même il renforce la présidentialisation du PS.

    Un simple vote de ratification de la cooptation proposée par Solferino constituerait une régression démocratique qu’il convient de rejeter afin d’allier définitivement suffrage universel direct et socialisme. 

  • Quel avenir pour la liberté conditionnelle face au désir d’allongement de la période de sureté ?

    Actuellement, une importante polémique a lieu en Belgique avec la libération conditionnelle de Michelle Martin la complice et ex-épouse de l’assassin-pédophile Marc Dutroux. Elle n’est en réalité que l’illustration des nouveaux débats posés depuis l’abolition de la peine de mort sur l’emprisonnement à perpétuité. En effet, la dignité humaine du détenu, sa possible réinsertion, et la surpopulation carcérale renouvèlent les débats. Quelle fin de vie en prison ? Quels aménagements de peine possibles conciliant sécurité de l’ordre public et réinsertion ?

    Noyades, harcèlements, rackets, sévices, rapts, prostitution, viols ou encore assassinats d’enfants, chaque drame concernant la sécurité d’un enfant fait angoisser des milliers de parents et de citoyens.

    En France, de plus en plus souvent, grâce à, l’Alerte enlèvement (inspirée de l’alerte Amber née aux Etats Unis et mise en oeuvre par la Secrétaire d’Etat Nicole Guedj) permet d’éviter le pire. Ce système qui mobile les Médias et les Citoyens est à l’évidence utile ; A ce jour, elle a toujours était couronnée de succès.

    Actuellement, une importante polémique a lieu en Belgique avec la libération conditionnelle de Michelle Martin la complice et ex-épouse de l’assassin-pédophile Marc Dutroux. Elle n’est en réalité que l’illustration des nouveaux débats posés depuis l’abolition de la peine de mort sur l’emprisonnement à perpétuité. En effet, la dignité humaine du détenu, sa possible réinsertion, et la surpopulation carcérale renouvèlent les débats.

    . Quelle fin de vie en prison ?

    . Quels aménagements de peine possibles conciliant sécurité de l’ordre public et réinsertion ?

    . Quel contenu à la notion de peine de sureté ?

    . Quelles conditions pour la libération conditionnelle ?

    La libération conditionnelle nécessite la manifestation d’efforts sérieux de réadaptation sociale de la part du condamné ; elle correspond à la mise en liberté d’un condamné avant la date d’expiration normale de sa peine d’emprisonnement, sous condition de respect, pendant un délai d’épreuve, d’un certain nombre d’obligations.

    Michele Martin.jpg
    - Une libération conditionnelle qui dérange

    La libération conditionnelle anticipée de l’ex-femme de Marc Dutroux Michelle Martin interpelle. Marc Dutroux a été reconnu coupable de viols et d’assassinats de six jeunes filles ; deux d’entre elles sont mortes de faim après avoir été emmurées dans la cave de la maison du couple. En Belgique, cet aménagement de la peine est né en 1888 avec la Loi Le Jeune.

    Michelle Martin, institutrice, n’a rien fait pour les aider ; elle a été condamnée à trente ans de prison, notamment pour complicité dans l’assassinat de Melissa Russo et Julie Lejeune.

    Réinsertion, rédemption, « pardon » sont-ils possibles alors que la condamnée a réellement effectuée seulement 16 ans sur sa peine ?

    Le 31 juillet 2012, le Tribunal d’application des peines de Mons a accordé cette libération et le projet d’accueil et de réinsertion auprès des Soeurs Clarisses du Couvent de Malonne, près de Namur. « Le projet est très encadré :

    - Michelle Martin, qui n’intègre pas la communauté, y résidera et doit le justifier ;

    - elle doit participer aux tâches communes comme l’entretien du potager ou la cuisine ;

    - elle peut sortir du couvent, mais elle a interdiction de se rendre dans les deux régions où elle a vécu avec son ex-mari ;

    - elle doit répondre à toute convocation de la justice ;

    - elle doit poursuivre la thérapie entamée en prison ;

    - elle ne peut établir de contacts avec les médias ;

    - elle est obligée d’indemniser ses victimes.

    Tout manquement est susceptible de conduire à la réincarcération ».

    A l’évidence cette libération a perturbé l’ordre public belge et divisée la société, aussi une trentaine de policiers assureront la protection du Couvent le temps nécessaire au retour à l’ordre. Selon Vincent Gilles, président du syndicat policier SLFP, ce dispositif coûtera 120.000 euros par mois.


    - Une hospitalité chrétienne qui choque

    soeurs.JPGConformément à la règle de Saint Benoît, l’hôte doit être reçu comme s’il était le Christ, surtout s’il s’agit d’un exclu de la société civile. Soeur Christine, l’abbesse du couvent a expliqué : « Madame Martin est un être humain capable, comme pour nous tous, du pire et du meilleur. Nous croyons donc que tabler sur le meilleur d’elle-même n’est pas de l’inconscience de notre part ».

    La hiérarchie catholique, par la voix de l’Evêque de Liège, Monseigneur Aloys Jousten, a soutenu cette démarche : « Un être humain reste un être humain », et il a salué « le témoignage de miséricorde » transmis par les Soeurs.

    Aujourd’hui, cette décision de « l’Eglise » choque l’opinion publique pour quatre raisons : d’une part les crimes commis sont d’une horreur rare, cette protection assurée dans le secret n’est plus possible à l’ère de l’hyper-transparence, l’Eglise protège encore de trop nombreux ecclésiastes coupables de pédophilie, enfin de nombreux Belges restent persuadés que Marc Dutroux faisait partie d’un réseau et disposait de protections politico-judiciaires.

    L’Église a aidé de nombreux dignitaires nazis ou collaborateurs à fuir en Argentine. Ainsi, de nombreux couvents et monastères ont abrité l’ancien milicien lyonnais Paul Touvier (condamné à mort par contumace en 1946) dans sa cavale. En mai 1989, c’est au prieuré Saint-Joseph, à Nice (Alpes-Maritimes), qu’il a été arrêté.

    Entre 1945 et 1953, plusieurs institutions catholiques ont abrité deux enfants juifs, Gérard et Robert Finaly, que leur tutrice refusait de rendre à leur famille juive française.

    En avril 2008, aux Etats-Unis, le Pape Benoît XVI a demandé pardon pour les victimes de prêtres pédophiles (entre 4 000 et 5 000 prêtres seraient concernés pour 14 000 enfants victimes) ! La Sainte Eglise a toutefois décidé de ne pas délier ses serviteurs du secret.

    Cette institution, malgré la multiplication des révélations sur la frustration des prêtres et la multiplication des actes pédophiles est une des rares à résister à l’hyper-transparence et à conserver ses archives secrètes.


    - Vers une réforme de la conditionnelle en Europe :

    La Cour de Cassation belge ayant rejeté les recours déposés par les parties civiles et le parquet contre cette libération Jean-Denis Lejeune (le père de Julie Lejeune l’une des victimes), a demandé une réforme de la justice visant à durcir les périodes de sûreté pour les condamnations des crimes les plus graves, notamment contre des enfants. Le 19 août 2012, 5000 personnes ont manifesté à Bruxelles en ce sens.

    L’opinion belge redoute de voir Marc Dutroux, condamné à la perpétuité, ressortir un jour en conditionnel de prison ; aussi, le Premier ministre Elio Di Rupo a annoncé vouloir renforcer les conditions de libération conditionnelle notamment en obligeant les récidivistes à purger au moins les trois quarts d’une peine de trente ans avant de pouvoir espérer une libération conditionnelle. "Notre objectif doit être : non à l’impunité. Nous devons poursuivre toute une série de réformes entamées dans le domaine de la justice et les engagements dans le domaine de la police".

    Pour de nombreux juristes et la plupart des victimes, il n’est pas normal qu’une personne condamnée à une peine n’exécute que partiellement cette dernière.

    Dans de nombreux Etats européens, la période de sûreté - ce temps défini par la juridiction de jugement qui a prononcé la peine privative de liberté pendant lequel aucun aménagement de peine ne peut intervenir - risque de s’allonger.

    En France, l’Article 132-23 du Code pénal dispose que : « En cas de condamnation à une peine privative de liberté, non assortie du sursis, dont la durée est égale ou supérieure à dix ans, prononcée pour les infractions spécialement prévues par la loi, le condamné ne peut bénéficier, pendant une période de sûreté, des dispositions concernant la suspension ou le fractionnement de la peine, le placement à l’extérieur, les permissions de sortir, la semi-liberté et la libération conditionnelle. La durée de la période de sûreté est de la moitié de la peine ou, s’il s’agit d’une condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, de dix-huit ans. La cour d’assises ou le tribunal peut toutefois, par décision spéciale, soit porter ces durées jusqu’aux deux tiers de la peine ou, s’il s’agit d’une condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, jusqu’à vingt-deux ans, soit décider de réduire ces durées.

     

    Dans les autres cas, lorsqu’elle prononce une peine privative de liberté d’une durée supérieure à cinq ans, non assortie du sursis, la juridiction peut fixer une période de sûreté pendant laquelle le condamné ne peut bénéficier d’aucune des modalités d’exécution de la peine mentionnée au premier alinéa. La durée de cette période de sûreté ne peut excéder les deux tiers de la peine prononcée ou vingt-deux ans en cas de condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité ».

    D’ores et déjà en Norvège, la libération conditionnelle d’Anders Behring Breivik ou sa remise en liberté après l’accomplissement de sa condamnation pose avec acuité la question de la révision de la période de sureté.

    En Espagne et en France, le motif médical devient un moyen efficace de bénéficier d’une liberté conditionnelle.

    En France, depuis la Loi relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé du 4 mars 2002, les condamnés peuvent être libérés s’ils souffrent d’une maladie incurable ou si leur incarcération met en danger leur santé. Maurice Papon et les condamnées d’Action Directe Nathalie Ménigon et Joëlle Aubron ont bénéficié de libérations conditionnelles pour des motifs médicaux.

    Ayant un projet professionnel sérieux, Jean-Marc Rouillan qui avait été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, notamment pour les assassinats de l’ingénieur général de l’armement René Audran et du PDG de Renault, Georges Besse a également bénéficié d’une libération conditionnelle.

    En Espagne, le prisonnier basque Iosu Uribetxeberria (qui souffre d’un cancer en phase terminale) a récemment obtenu sa libération par le juge principal de l’application des peines auprès de l’Audience nationale (le Parquet peut encore faire appel).

    La réflexion sur la réalité du temps de peine effectué, sur la période de sureté et les moyens de favoriser des libertés conditionnelles pour les condamnés en réinsertion est sans doute un des plus grands défis de cette époque où l’horreur des crimes commis rend tout débat et proposition de réforme soit suspecte d’atteintes aux droits et libertés soit sujette à l’idée de laxisme.

    La recherche d’un équilibre entre réinsertion des criminels et respect des victimes doit guider l’action publique.

  • Émeutes à Amiens : à quand des mesures pour restaurer la confiance dans les quartiers ?

    LE PLUS. Alors que la police vient de procéder à cinq premières interpellations suite aux émeutes qui ont touché Amiens en début de semaine, certains relancent le débat sur le délaissement des banlieues par l'État. Pour le militant Mahor Chiche, ces débordements sont la conséquence d'une "ghettoïsation" des quartiers, où les politiques de la ville ont échoué.

    Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a eu raison de condamner avec fermeté les violences d’Amiens, mais il convient d’aller plus loin pour reconquérir ces "territoires perdus de la République".

    Depuis des décennies, la réflexion sur les quartiers difficiles, la politique du logement "tout béton", la concentration de la misère dans des quartiers périurbains, l’absence d’emplois et de réussites scolaires, le développement corollaire de toutes sortes de trafics dans une partie du territoire français alimentent les travaux de recherches, mais la prise de conscience politique demeure insuffisante.

    À l’initiative de l'Association des maires de France, le renouvèlement urbain s’accélère, mais il est difficile pour les habitants de sortir un quartier de l’image négative qui lui colle à la peau depuis des années. Surtout, les pouvoirs publics investissent bien plus dans la rénovation urbaine que dans la présence humaine (éducateurs de rue, gardiens…). De la paupérisation à la ghettoïsation, de la violence quotidienne à la communautarisation, l’échec des politiques de la ville est patent.

    Le candidat François Hollande – un des premiers responsables politiques à avoir utilisé le terme "ghetto" – avait bien compris l’enjeu en déclarant, lors de son discours à Aulnay-sous-Bois : "Dans la République que je veux, je refuse qu’il y ait du ghetto – du ghetto pour les riches et du ghetto pour les pauvres. Je veux de la mixité, je veux de l’échange, je veux du partage."

     

     Des voitures brûlées lors des émeutes à Amiens (F.HUGUEN/AFP).

    Les émeutes de 2005 n’ont pas modifié les politiques publiques

    En 2005, la mort de Zyed et Bouna après une course-poursuite déclencha les pires émeutes urbaines connues en France. Les pouvoirs publics parurent alors bien désarmés face à l’ampleur du phénomène et les faibles réponses disponibles (hormis policières). Certains avaient même alors préconisé le recours à l’armée, comme si ces quartiers abritaient un "ennemi". 

    Insultes, brimades, contrôles au faciès, bavures, gardes à vue injustifiées (près d’un million de français sont placés chaque année en garde à vue), développement des outrages à agents et rébellions sont autant d’éléments cristallisant la méfiance entre policiers et citoyens.                

    À Amiens, un simple contrôle routier a conduit à des poubelles et voitures brûlées, des abribus et trois bâtiments publics détruits, dont une école et un centre sportif, et seize policiers blessés. Cette fois-ci, on doit tous constater que les armes qui existent dans les cités ont été utilisées, ce qui marque le franchissement d‘un "interdit" supplémentaire.

    La confiance est manifestement rompue entre citoyens et police, et plus particulièrement entre jeunes et police. Dans ces quartiers, le dernier vestige de la puissance de l’État est bien souvent la présence policière.

    Ravages de la crise économique et de la culture du "chiffre"

    Concrètement, ces dix dernières années, la culture du "chiffre" a mis une pression intenable sur les forces de police, qui n’ont ni les moyens humains ni matériels d’accomplir leurs missions. Dans la même soirée, le même agent doit patrouiller, auditionner et enregistrer les plaintes, ou encore sortir les véhicules. De trop nombreux commissariats ne disposent pas du minimum acceptable pour l’accueil des victimes : salles d’écoute, personnels, distributeurs de boissons… Les policiers français (hormis en matière de résolution de meurtres et assassinats) ont perdu l’estime des français.

    Dans les quartiers difficiles, la rupture de confiance entre les populations de ces zones et l’idée d'une police au service de tous est amplifiée. Les services publics absents, les associations fragilisées financièrement et dépourvues d’objectifs ne réussissent plus à maintenir la "paix" sociale. "Le vivre ensemble" d’antan qui faisait que chacun se connaissait et veillait sur les plus jeunes est mort, la crise économique et le modèle du caïd ont fait leurs ravages.

    L’incantation d’une République présente partout sur le territoire national est respectable. Mais sans une vision sur dix ans et sans ambitions ni moyens pour changer les villes, le malaise perdurera. Résidentialisation, vidéoprotection, polices municipales sont devenues les axes d'action en vogue des collectivités locales négligeant la prévention, à commencer par la présence humaine. 

    Ces émeutes sont avant tout l’expression d’un sentiment d’abandon. Il faut d’urgence réunir les acteurs des quartiers et mettre en place des mesures qui restaureront la confiance.

    Édité par Rozenn Le Carboulec, LE PLUS, 16 août 2012